MICROLITHES DU 5 MARS 2023

ARRACHEURS DE DENTS
Staline était un modéré en comparaison avec Trotsky, qui nous a fait l’amabilité de se laisser assassiner. Son programme était celui d’une « révolution mondiale sanglante ». De Lionel Jospin à Jean-Luc Mélenchon, personne n’a eu l’idée de s’excuser de ses sympathies pour cet idéologue génocidaire. Jusqu’au titre du livre du préfet de police Didier Lallemant (responsable de la répression des Gilets jaunes) L’ordre nécessaire, référence à Trotsky. On ne dénonce jamais les crimes de l’extrême gauche, focalisé sur ceux de l’extrême droite. Quant à l’extrême centre d’Emmanuel Macron… sous la direction du même berger Lallemant, certains Gilets jaunes en savent quelque chose : un œil pour pleurer, une main pour applaudir. 

CHARABIA 
Schopenhauer reprochait la même chose à Hegel (dont la philosophie avait supplanté la sienne dans les universités allemandes) : « L’impudente scélératesse de ce charlatan [consiste] à assembler des mots qui désignent des opérations impossibles de l’intellect, notamment des contradictions et des non-sens de toute espèce » (Aphorismes et insultes page 76). C’est un commentaire sur la citation suivante dont le vocabulaire n’est pourtant pas particulièrement compliqué : «  L’existence comme l’être s’entremettant avec lui-même par la négativité de lui-même, est le rapport à soi-même, seulement en ce qu’elle est un rapport à autre chose, qui n’est directement que posée et entremise. »

LES EXCUSES D’ONFRAY
La République ne nous aura rebattu les oreilles pendant des années avec les dangers de l’amalgame, de la discrimination et de la haine que pour nous les faire subir. Comme dit le chat dans Alice au pays des merveilles, la question n’est pas de savoir le sens des mots, la question est de savoir « qui est le maître, un point, c’est tout. »
Les non-vaccinés étaient déjà estampillés “antivax” par amalgame, visés par une discrimination impitoyable (la question de savoir si elle était légale étant nulle, vu ce qui avait été fait du consentement libre et éclairé) et désignés au mépris, au ressentiment et… à la haine. Michel Onfray, qui sait qui est le maître, les avait traités d’égoïstes, d’ignorants, d’irresponsables ; le trait n’étant pas encore assez gros, il les avait comparés à des propagateurs du sida. Aujourd’hui il s’en excuse, revient sur ses propos. Si les excuses de Michel Onfray valent quelque chose, alors il faut en tirer les conclusions sur ses capacité de réflexion en temps de crise… et sur sa faculté à fermer sa gueule. 
Certains philosophes gagneraient à être moins bien compris.

STUPIDITÉ ARTIFICIELLE
Sans vouloir minimiser les dangers que présente l’intelligence artificielle… 
Si les machines sont aujourd’hui capables d’écrire des articles, c’est parce que l’activité s’était déjà systématisée, les humains avaient déjà entamé leur transformation en machines, mécanisé leur activité intellectuelle ; je ne parle pas de l’écriture automatique des surréalistes, mais d’une forme d’écriture mécanique excluant toute garantie d’authenticité, comme l’expérience, l’affect, les scrupules. Voir par exemple la publicité, les discours politiques, les texte accompagnant les « œuvres d’art » contemporaines…
La presse a parlé récemment d’une forme d’intelligence artificielle tellement perfectionnée qu’elle en est arrivée à tenir des propos racistes, « révisionnistes » (mot qui n’est jamais employé correctement : le travail d’un historien est de réviser l’histoire). La nouvelle a été relayée avec un mélange d’effroi et d’admiration. De deux choses l’une : soit on avait affaire à une machine effectivement raciste et révisionniste, soit – hypothèse encore inédite : l’intelligence des observateurs était déjà artificialisée, leurs conclusions prédéterminées, conditionnée pour taxer un très large éventail de propos de racisme, sans réfléchir (condition nécessaire et suffisante ; le logiciel s’appelle le politiquement correct). Dans le film Up in the air George Clooney explique à sa jeune collègue qu’il choisit toujours les files occupées par des groupes d’asiatiques car ils sont plus efficaces et que l’attente y est moins longue ; réaction de la jeune femme : « C’est raciste ! ». Raisonnement machinal. Cela dit, le raisonnement machinal peut aussi être très sophistiqué, comme celui de beaucoup de philosophes modernes avec leur « système ». 
Il s’agit donc de faire la distinction entre l’intelligence artificielle électronique et l’intelligence artificielle organique : produite par nos cerveaux. 

https://www.lemonde.fr/pixels/article/2016/03/24/a-peine-lancee-une-intelligence-artificielle-de-microsoft-derape-sur-twitter_4889661_4408996.html

LE FOND DU PUY
Sortie du film Vaincre ou mourir, production du Puy du fou, qui relate la révolte et le massacre des Vendéens (les partisans du régime monarchique), donc la face sombre post-révolutionnaire sur laquelle l’école de la République se montre très pudique : la Terreur. Libération s’étrangle et titre, à la une, Le Puy du fourbe. Ce film « réécrit l’histoire » commente le journal dans son plus pur style hospitalo-caritatif. C’est bien possible, si on précise qu’il réécrit l’histoire officielle. Dans La tête coupée d’Arnaud-Aaron Upinsky, évoque le général Turreau et ses colonnes infernales qui, à partir du 17 février 1794, ont porté le massacre à des degrés inouïs. En janvier 1794, il avait écrit à la Convention : « Vous devez prononcer également d’avance sur le sort des femmes et des enfants. Si je dois les passer tous au fil de l’épée, je ne puis exécuter cette mesure sans un arrêt qui mette ma responsabilité à couvert. » Demande acceptée. Voilà comment on écrit l’histoire. 

SUR LES MURS DE LA CAVERNE
De beaux moments de jeu dans le film d’Édouard Baer Adieu Paris tourné en 2021 à la Closerie des Lilas, parce qu’il faut bien faire vivre les artistes. Certes depuis 2020 ces acteurs pourtant aimés Poelvorde, Arditi, Depardieu, etc. ne sont plus que l’ombre d’eux-mêmes ; peu rancunier, on peut continuer à les aimer un peu, projetés sur les murs des cavernes. 

MICROLITHES du 19 janvier 2023

MICROLITHES
Le titre de cette rubrique signifie « petites pierres » (inversement au mégalithe dans L’étoile mystérieuse). Petites pierres à envoyer en direction de ceux qui, selon l’expression anglaise « vivent dans une maison de verre » (« Il ne faut pas jeter des pierres quand on vit dans une maison de verre » est l’équivalent de la paille et la poutre). « Petite pierre pointue » est aussi l’étymologie de « scrupule ». À l’intention de ceux qui n’en ont pas, donc.

RELATION D’EMPRISE
La fiction offre de très nombreux exemples de relations d’emprise. Cela ne rend pas plus facile de les identifier autour de nous pour autant, vu que le manipulateur et sa victime trouvent leur compte à sauver les apparences ; le manipulateur pour des raisons évidentes, la victime parce que la perception d’elle-même est assujettie au regard de son manipulateur. 
Quand on dit à certaines personnes “vaccinées” qu’elles ont accepté de se faire injecter un produit inconnu, on assiste littéralement à un court-circuit cognitif dont l’enjeu est de contrefaire les notions de “injecter”, de “produit” et de “inconnu”. Dans un monde où le Pouvoir attribue aux mots et aux informations un sens arbitraire et versatile (langage paradoxal) et où toute réalité est réversible, ces personnes déploient les artifices qui servent à entretenir leurs illusions autant qu’à désorienter leur interlocuteur. Sur Facebook, on m’a même rétorqué que la “pandémie” n’avait donné lieu à aucun matraquage médiatique, que c’était une question de “ressenti”. Je me suis contenté de répondre à mon interlocuteur qu’à moins d’être un ermite, il savait très bien que c’est faux. La défense par leurs victimes des auteurs d’un abus de confiance, la justification de leurs méfaits par les mêmes victimes a tout de la relation d’emprise.

https://twitter.com/lugaxker/status/1371825109560918016

TICS DE PENSÉE
Quand on parle de tyrannie ou de dictature, la référence au “nazisme” est automatisée à un point qu’on devrait peut-être se retenir. Même l’excellente Ariane Bilheran. Et quand on parle du régime soviétique, il faudrait cesser de fermer les yeux sur ce qui s’est passé avant Staline : les massacres ont commencé dès 1917, selon la logique : « on ne fait pas l’Homme nouveau sans casser d’hommelettes ». 

CORPS CAVERNEUX (Badiou, Zizek, Onfray)
Dans un entretien donné au journal belge Kairos, le sympathique philosophe Mehdi Belhaj Kacem nous apprend qu’il a mis huit mois avant d’accuser le coup de la crise covid et de commencer à se poser des questions. D’où sa lettre ouverte au philosophe Alain Badiou, en libre accès en ligne. Dans son essai Contre Badiou, l’ancien disciple revenait entre autres sur l’apologie de Pol Pot par Badiou ; je m’étonne un peu au passage de la naïveté de MBK : que les intellectuels d’extrême gauche aient cautionné implicitement ou explicitement des génocides n’a jamais choqué grand monde. 
Badiou n’est pas le seul intellectuel d’extrême ou de moyenne gauche à avoir sombré dans la religion covidiste. Un autre de ses admirateurs, Slavoj Zizek (qui a de l’humour et le sens de l’anecdote, quand il ne s’enlise pas dans des considérations hégélo-lacaniennes), mais aussi Noam Chomsky et Michel Onfray ont embrassé ce culte. 
Rappelons que pour de nombreux idéologues, le covid est un déclencheur idéal  pour la transition vers une “grande réinitialisation” de l’humanité (ou « quatrième révolution industrielle » promise par le Forum économique mondial et son jamesbondien directeur, Klaus Schwab, ou “gouvernance mondiale”prophétisée par d’autres publicistes comme Jacques Attali) ; cela semble aller dans le sens des fantasmes révolutionnaires de l’extrême gauche, les derniers assurant la théorie et les premiers, la politique en action. Après tout, la disparition des particularités locales et nationales sont un élément central du communisme et du mondialisme, qui souhaitent tous deux l’avènement d’un homme nouveau

LE LOUP ET L’AGNOTOLOGUE*
On utilise le mot “complotiste” à la forme négative pour dire qu’on ne l’est pas ou à la forme affirmative pour discréditer les autres, comme le fait (ne résistons pas au plaisir de tirer sur une ambulance) Thomas Durand, dit La tronche en biais au micro avec André Bercoff sur Sud Radio. Une définition du complotiste est “qui doute de la version officielle des événements”. D’où on peut déduire que l’anti-complotiste est celui qui se réfugie inconditionnellement, qu’il soit payé pour le faire ou non, derrière la version officielle, c’est-à-dire, derrière la loi du plus fort. C’est une stratégie qui se comprend, en termes de réduction de risques. Du moins à court terme. 

*merci à Nicolas d’Asseiva, dans son roman-miroir Pax Dystopia , pour m’avoir appris ce mot – même s’il se prononce comme “agnostique” et non comme “agneau”. 

LA VOIX DE SON MAÎTRE
Invité à Sud Radio, un imbécile à la satisfaction tartinée sur le visage dénommé Michel Musolino a sorti un livre intitulé Le guide du parfait complotiste. Dans un monde renversé, il est tout à fait normal que ce personnage reproche aux complotistes la méthode qui consiste à « accumuler des arguments ». On en déduira ce qu’il faut sur les vérités officielles. 

TRIANGLE 
Dans la première scène du film sardonique Triangle of sadness, on assiste à un casting de mannequins hommes au cours duquel on leur apprend à sourire quand ils posent pour les marques bon marché et à afficher une moue méprisante pour les marques de luxe telles que Balenciaga. Il n’y a pas que les enfants objétisés qui font la gueule dans la dernière campagne publicitaire de cette marque diabolique. La chaîne Le juste milieu dresse un excellent aperçu de cette ténébreuse affaire. 

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