JEFF BEZOS : LARMES DE CROCODILE SUR L’AMAZON

JEFF BEZOS RÊVE DE STAR TREK

Wishmaster est un film horrifique de 1997 assez amusant qui reprend le motif du conte des mille et une nuits Aladin et la lampe magique pour le pervertir. Ce que la victime ne sait pas, c’est que le génie retournera son troisième vœu contre elle : qu’elle souhaite par exemple gagner un million de dollars, le djinn fait en sorte que sa mère souscrive à une assurance vie pour cette somme et meure dans un accident d’avion (ce qui pour certains serait faire d’une pierre deux coups).
Qui sont les djinns aujourd’hui ? Probablement ceux que la presse qu’ils achètent appelle des « philanthropes », ce que beaucoup de gens prennent pour argent comptant. Que ce soient des ex-vice-présidents des États-Unis qui capitalisent sur la peur du “réchauffement climatique” mais achètent des villas sur la côte tout en nous menaçant d’une montée du niveau de la mer, ou des multi-milliardaires qui déclarent lutter contre la surpopulation par la vaccination (Bill Gates dans sa conférence sur le site TED).

Gardons à l’esprit la morale de ce film à chaque fois qu’on entend parler des lubies de certains milliardaires ou illuminés de la Silicon Valley, comme celle, très sérieuse, qui promet la possibilité de télécharger son âme pour vivre éternellement à l’état de machine (Ray Kurzweil, pris très au sérieux par le délicieux Laurent Alexandre), ce qui, entendons-nous, n’est possible que si on sait exactement ce qu’est l’âme ou qu’on ne l’a pas perdue.
Le titre probablement ironique d’une très intéressante biographie du multi-milliardaire Jeff Bezos visible sur Youtube (sur la chaîne de PAUL) est Le profit ne l’intéresse pas.
Si Jeff Bezos veut être considéré comme un philanthrope, mieux ne pas le juger sur ses actions… ni sur ses projets. D’après le livre En Amazonie de Jean-Baptiste Malet, le travail d’un employé d’Amazon est en plus d’être épuisant que celui d’un magasinier dans n’importe quelle autre société, humiliant, abêtissant et infantilisant : le simple fait de se rendre à pied dans les lieux réservés aux pauses absorbe le temps qu’on devrait y passer ; en plus du fait que ce travail est ce qui se rapproche le plus de l’esclavage moderne (formule encouragée par les États de l’Union Européenne qui n’exigent que des impôts dérisoires de la part de ces multinationales), Amazon fait aussi face à des accusations de pratiques monopolistiques,répressions des mouvements syndicaux dans certains entrepôts, remboursement de 100 % des pourboires pris aux livreurs de son programme Flex, à des  accusations d’espionnage industriel, surveillance de ses employés ou de ses clients…
Selon un principe matérialiste cher au philosophe Hegel, la valeur d’un être se mesure à la fonction qu’il occupe dans la société, ce qui augmente d’un coup la valeur symbolique d’un employé d’Amazon, qu’on peut considérer, toujours selon les principes hégéliens1 comme une cellule de l’organisme social dont Jeff Bezos ne serait que le visage (et qu’on n’aille pas m’accuser d’avoir lu Hegel).

Si Jeff Bezos a quitté la direction Amazon, il en reste un actionnaire important, et se consacre donc à ses projets pour l’humanité, qui retient son souffle. Fasciné depuis son enfance par la série Star Trek (lancée à la télévision américaine en 1966), Jeff Bezos prétend travailler à la réalisation d’un avenir où l’humanité vivrait dans l’espace pour préserver la Terre. Tout comme le djinn retourne nos souhaits contre nous, il n’est pas inutile de retourner contre eux les généreux projets de ces milliardaires pour l’humanité.
La fortune de l’ancien patron d’Amazon Jeff Bezos lui a permis de renouer avec ses rêves d’enfant, quand il était fasciné par la série Star Trek et sa mythologie […] Excellente série au demeurant, Star Trek est aussi un rêve mouillé de mondialiste (et ne confondons pas mondialisation, qui est le développement naturel des échanges commerciaux et culturels, avec l’idéologie mondialiste du nouvel ordre mondial) avec son gouvernement mondial invisible exporté dans l’espace.
Voici ce qu’en dit l’anthropologue David Graeber dans son très intéressant Bureaucratie :

« La Fédération des planètes – avec son idéalisme de haute tenue, sa stricte discipline militaire et l’absence manifeste en son sein tant de différences de classe que du moindre indice tangible de démocratie multipartite – n’est-elle pas, en réalité, une simple vision américanisée d’une Union soviétique plus gentille, plus aimable, et surtout « qui marche »19 ? Ce qui me paraît remarquable dans Star Trek, en particulier, c’est non seulement qu’il n’y a aucune trace réelle de démocratie, mais que pratiquement personne ne semble remarquer son absence. […] Les personnages de Star Trek se plaignent constamment des bureaucrates. Ils ne se plaignent jamais des politiciens, parce que les problèmes politiques sont exclusivement traités, toujours, par des moyens administratifs21.
Mais, bien sûr, c’est exactement à cela que l’on s’attendrait sous une forme de socialisme d’État. Nous oublions souvent que ces régimes aussi affirmaient invariablement qu’ils étaient des démocraties. Sur le papier, l’Union soviétique de Staline pouvait se vanter d’une Constitution exemplaire, avec infiniment plus de mécanismes de contrôle démocratique que les systèmes parlementaires européens de l’époque. »

Lors du forum Ignatius, qui a eu lieu à la National Cathedral de Washington le 11 novembre 2021, Jeff Bezos a fait part de ses projets pour l’humanité et pour l’espace – il faut bien commencer quelque part.
Selon lui, il est souhaitable que la terre devienne, dans les décennies à venir, une réserve naturelle que l’humanité, qui vivrait dans des colonies spatiales, pourrait avoir le privilège de visiter, même si selon Bezos, cette humanité pourrait jouir dans ses colonies de conditions proches de la terre avec faune et flore reconstituées (programme moins modeste que celui de Noé qui n’avait pour mission que de sauver la faune) puisqu’il va de soi que tout cela serait possible.
Lors de cet entretien de vingt-cinq minutes, Bezos se montre d’ailleurs assez piètre orateur, répétant à l’envi qu’on ne peut laisser la terre sa dégrader sous l’influence de l’homme (Son mantra est « This planet is special, we can’t ruin it… »), celui qui se rêve en gardien de réserve naturelle géante et de colonies spatiales parle de l’envoi de millions d’être humains dans l’espace de manière à libérer la terre et lui permettre plus ou moins de redevenir un Eden, sur lequel seuls une poignée de privilégiés (Bezos ne nous dit pas qui) seraient résidents permanents, avec leur valetaille privilégiée.
Une question que ne pose pas cet article est celle de savoir selon quelles règles mathématiques quelques millions (dans le futur) additionnés à une poignée donne plusieurs milliards. En d’autres mots : que deviennent les quelques milliards d’individus qui ne vivent ni dans l’espace ni sur terre ?

Hasardons deux hypothèses :
– La première est que ces milliards d’êtres humains auront disparu ; mais Jeff Bezos, qui postule cette disparition ne dit pas comment elle aura eu lieu.
Le milliardaire Ted Turner, qui était malthusien et donc en faveur d’un contrôle draconien de la population ne disait pas non plus comment ; pas plus que Bill Gates qui lors de sa conférence sur la plateforme TED, déclare son intention se servir de la vaccination pour contrôler la population mondiale (il ne parle que du contrôle du nombre, si cela peut en rassurer certains).
Le monument gnostique des Georgia Guidestones édicte plusieurs règles d’harmonie mondiale la première étant de parvenir au seuil idéal d’une population de 500 millions de personnes, la dernière enjoignant ceux qui ont l’occasion de la lire à « ne pas être un cancer à la surface de la terre » et de « laisser de l’espace à la nature ». C’est sans doute par modestie que Bezos néglige de préciser la part importante qu’il a prise avec son entreprise à la pollution des airs et des mers (puisque l’activité d’Amazon a contribué pour une bonne part aux transports aériens et maritimes par containers – pour donner un petit ordre d’idée, la consommation d’un petit bateau affichant une puissance de 500 CV, à une vitesse de 50 nœuds, sera estimée à 500/3 = 166 litres /heure)
– la seconde hypothèse est que la plupart des milliards d’individus qui composent la population mondiale ne font pas partie de l’humanité, ce qui rend inutile de les inclure dans l’addition.
– Une troisième hypothèse, compatible avec les deux précédentes est que l’extrême richesse est une pathologie mentale. Mais une pathologie opératoire puisque des ressources financières illimitées permettent de modeler le monde selon ses désirs ; ainsi la fondation Bill and Melinda Gates, qui finance tous les organismes de santé du monde dans des proportions variables, notamment les universités qui emploient la plupart des experts médiatiques qui défilent sur les chaînes pour nous dire tout le bien qu’ils nous veulent ; autre exemple, Jeff Bezos, encore lui, qui a acheté le journal Washington Post, probablement dans des intentions meilleures que le milliardaire Xavier Niel qui déclarait : « Quand les journalistes m’emmerdent, je prends une participation dans leur canard et après, ils me foutent la paix. ».

Ma foi, si l’extrême richesse de Jeff Bezos est animée de bonnes intentions… 

Si…

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Image Twitter

Vous commentez à l’aide de votre compte Twitter. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s

%d blogueurs aiment cette page :