LE DÉMON À L’ENDROIT #1


L’APPARITION DE FIGURES DÉMONIAQUES DANS LES GRANDES VILLES EST-ELLE INNOCENTE ? LES IMAGES NE SONT-ELLES « QUE » DES IMAGES ?  

C’est en deux temps que j’ai découvert cet affichage recouvrant le bâtiment voué à devenir le futur centre Canal Pompidou. Venant de l’autre côté du canal de Bruxelles, situé hors champ, un peu plus loin à gauche sur la photo, j’avais remarqué que l’image de ce paysage volcanique (c’est ainsi que je l’ai perçu d’abord) ne comportait pas de texte : pas de marque, pas de slogan. Il ne s’agissait donc pas de publicité. Du moins, pas de publicité commerciale. J’étais à vélo sur cette artère au trafic dense et il a donc fallu que je m’arrête pour mieux voir la figure dont je n’avais vu que le bout d’une aile.  

Pas de marque, pas de logo, pas de slogan, donc, mais un visage. J’étais au courant de la reconversion du bâtiment Citroën… il ne fallait donc pas être grand clerc… Un ange déchu, un démon. Gigantesque. Conquérant Il semble déterminé à partir à la conquête du monde, tel un nouveau Rastignac. Je n’étais pas surpris, il s’agissait d’une nouvelle sorte d’épiphanie. Ce n’était pas la première, ce ne serait pas la dernière (ceci est le début d’un feuilleton). 
Une fois rentré chez moi, le site de Kanal-Centre Pompidou allait m’en apprendre un peu plus. Comme je m’en étais douté, la personne représentée en  démon n’était autre que l’artiste lui-même, Tarek Lakhrissi, qui dans l’interview de présentation de son œuvre, parle des anges de la série Angels in America et des Ailes du désir, sans expliquer la conversion automatique qui s’était faite dans son esprit en la figure de l’ange déchu. (www.youtube.com/watch?v=awr_uoqi38g). J’attire l’attention des lecteurs sur le fait que certains artistes ont avoué le plus sérieusement du monde avoir vendu leur âme au diable en termes plus ou moins couverts : Bob Dylan, Johnny Halliday (d’après un témoignage certes indirect), Katy Perry (www.youtube.com/watch?v=yDM7D1teDco&ab_channel=EndTimeChristian), et que nombre de personnalités du spectacle et de la culture sont photographiées arborant des signes occultes (œil unique…), dont les implications doivent être étudiées.
« En tant que personne de couleur, déclare Tarek Lakhrissi, je ne voulais pas me cacher derrière quelqu’un d’autre et demander à quelqu’un de le faire pour moi. » 

Une autre œuvre de Tarek Lakhrissi : The evil part of me is laughing (« La part maléfique de moi rit ») – Galerie Nicoletti, Londres, automne 2024.

Voici un extrait de la présentation de l’œuvre RISING sur le site Kanal : 

RISING (1), l’œuvre de Tarek Lakhrissi commandée par KANAL-Centre Pompidou pour la série FAÇADE, explore (2) la force de la représentation et de la narration dans l’expérience de vie des personnes queer non blanches (3). Pour ces communautés (4), qui défient les normes de genres, d’orientations sexuelles et le racisme structurel (5), la représentation dans le cinéma, la musique, les jeux et la culture numérique a une valeur émancipatrice (6). L’échange avec des personnes partageant les mêmes idées (7) et expériences favorise un sentiment de fierté (8), d’appartenance et de solidarité (9). Un processus essentiel pour se frayer un chemin parmi les récits traditionnels et imaginer des alternatives. […] Le protagoniste [de RISING] – un avatar d’ange (10) – symbolise l’incarnation d’une divinité sur terre (11). 

1. Ce ne sera pas ici la dernière des inversions opérées. Rising signifie « le fait de s’élever ». C’est tout naturellement que ce mot devient le titre d’une œuvre représentant un ange déchu. Soit il décrit une inversion, soit il suggère ce qui se passe après la chute. Dans l’Ancien Testament, l’archange Lucifer, après avoir défié Dieu, est tombé sur terre pour corrompre l’âme des mortels avec l’aide de ses légions d’anges rebelles : les démons. 
2. L’art officiel dit contemporain « explore », « interroge », « questionne ». Il ne fait rien à la légère. Mais surtout : il expose son programme à l’intention des profanes et des simples d’esprit.
3. À rebours de l’universalisme, cette compartimentation de l’humanité occidentale en catégories (dont le tiers exclu est toujours le mâle blanc hétérosexuel) opère, ici de manière tout à fait cohérente, selon une tactique de division (qui est l’étymologie du mot diable : qui coupe la course du bolide, en grec ancien : qui désunit, qui inspire la haine ; vient de diaballein, qui signifie jeter  (ballein) en travers (dia) ou jeter entre) en vue de l’opposition non-dite contre un ennemi commun. La méthode éprouvée par Tullius Detritus dans l’album d’Astérix La zizanie continue à faire ses preuves. 
4. Communautés représentées par des associations victimaires extrémistes, usurpatrices et ventriloques. 
5. Rendons hommage à l’adversaire : la mise devant le fait accompli est toujours infiniment plus efficace que l’imposition progressive par l’argumentation, surtout quand l’illusionnisme s’impose. Notons tout de même que la compartimentation de l’humanité réalise ce “racisme systémique”, qui aura dès lors toujours existé en germe. Le narcissopathe a toujours raison. 
6. Une fois qu’on a décidé qui est opprimé : ceux qui se définissent ainsi, il devient plus facile de déterminer qui a besoin d’être « émancipé ». Quant à l’équivalence entre représentation et émancipation, elle va de soi. Il s’agit là d’une forme subtile, classique et efficace d’intimidation. Si vous ne comprenez pas le raccourci, vous faites partie du problème.
7. L’argumentaire se hasarde ici à une déduction  qu’on n’a le droit de faire que si on n’est pas raciste : la corrélation entre couleur de peau et mode de pensée. 
8. Fierté compatible avec l’idéal certes flou (et on comprend pourquoi il a intérêt à le rester) d’égalité. 
9. Pour bénéficier de cette solidarité, il faut faire partie d’un club. 
10. La confusion est naturellement entretenue entre l’ange et l’ange déchu (le démon), la confusion entre le bien et le mal (j’y reviendrai dans un autre article). 
11. Curieux retour du paganisme via l’art officiel dit contemporain… 

Il faut envisager que ce « récit », cette fiction imaginée en haut lieu est un mensonge qui dit la vérité et que si vous n’y croyez pas, on y croit pour vous. Ce ne sont que des mots, mais cela ne doit pas nous faire oublier que ce sont les mots du pouvoir. De sa branche récréative, certes, mais du pouvoir quand même. 

LIBRE JOURNAL DE SALSA BERTIN, CHRONIQUE #1

CHRONIQUE SALSA BERTIN #1 : PAIX chronique du 29 novembre 2023

Depuis novembre dernier, je tiens une chronique mensuelle dans le libre journal de Salsa Bertin sur Radio Courtoisie. J’ai décidé d’en publier les textes. Le premier mot à tiroir proposé Paix, m’avais donné du fil à retordre. Le trac, aussi, pour cette première chronique radiophonique.

Je ne sais pas si je dois vous remercier de m’avoir proposé d’inaugurer cette chronique avec un mot aussi galvaudé et générique que le mot PAIX. 

Je vais commencer par la définition du Robert historique. Paix : acte de passer une convention entre deux parties belligérantes ; absence de guerre ou de conflit qui en résulte… 
Il est intéressant de noter que jusqu’à la fin de la deuxième guerre mondiale, l’absence de guerre s’est appelée « paix armée ». Depuis 1945 et la guerre froide, elle s’appelle « équilibre de la terreur », ce qui a de la gueule… 
On a cru un temps que la fin de la guerre froide marquait « la fin de l’histoire » (c’est la thèse de Francis Fukuyama), une drôle de paix qui n’excluait pas les conflits mais signifiait la victoire idéologique de la démocratie et du libéralisme sur les autres régimes. 
L’hypothèse d’une société néo-libérale repose sur l’idée que le libre échange généralisé représente le meilleur fondement possible pour l’harmonie sociale donc, pour la paix. Selon l’excellent sociologue Jean-Claude Michéa, c’est une idée paradoxale puisqu’elle repose sur l’hypothèse d’un monde où les individus sont gouvernés par la cupidité. Dans ce monde, le seul mécanisme possible de l’harmonie sociale est le marché. Non content de réduire les hommes à l’appât du gain, cette thèse affirme que cela mène, sans l’opération du saint esprit, à une société idéale et vertueuse.  

Les démocraties libérales promeuvent presque exclusivement le potentiel consommateur de l’individu. Le bonheur y est réduit au pouvoir d’achat sous le nom de « consommation des ménages » ; l’individu y est précarisé au nom de la concurrence – précarisé pour les pauvres, nomadisé pour les privilégiés ; c’est l’individu nomade prophétisé par Jacques Attali et joué par George Clooney dans le film Up in the air
Dans ce régime en paix, il n’y a de place que pour les pulsions consuméristes et hédonistes – c’est-à-dire qui concernent le plaisir. 
L’Union européenne a été créée selon ce principe ; elle l’a d’ailleurs repris en slogan sous la forme – ne riez pas – « l’Europe c’est la paix ». Mais l’Union européenne a aussi été créée sous un autre prétexte (d’ailleurs mensonger (1)) celui de la la concurrence avec les États-Unis, donc : la guerre économique. Elle a même créé une direction générale spécialement dédiée à la concurrence, quasiment élevée au rang de pratique religieuse

Dans le monde réversible des démocraties libérales, on peut aussi appeler la paix, « guerre de tous contre tous » ; il ne s’agit pas d’une situation où les gens s’entretuent mais d’une situation où chaque individu est en concurrence avec les autres et ou le meilleur gagne : et le meilleur, ce n’est pas le meilleur, c’est le plus fort. 
Ce système, soumis à la loi du plus fort (j’en profite pour vous renvoyer à la fable de Lafontaine Le loup et de l’agneau) ce système donc, donne naturellement lieu à toutes les inversions
George Orwell l’a prophétisé dans son roman 1984 avec sa formule : « La guerre c’est la paix. » qui offre deux interprétations : 
– La guerre est un signe de paix dans un monde où il ne faut pas se fier aux apparences mais uniquement aux discours officiels ;
– La paix cache une guerre invisible dans un monde où tout est réversible.
L’inversion des valeurs étant devenue la norme, elle produit un président qui parle comme il respire : les lapsus lui permettent parfois de dire, accidentellement, la vérité. 
Il a ainsi déclaré « J’assume totalement d’avoir parlé avec le président de la Russie pour éviter la paix, pour éviter la guerre, pardonnez-moi… » Vous trouverez cette séquence vidéo en tapant “Macron lapsus” (2). 
Et pour finir, à propos de menaces pacifiques, en anglais, un “pacifieur”, “pacifier” est une tétine. 

Dans le monde rêvé par le fanatique du transhumanisme Yuval Noah Harari, auteur du best seller Homo deus, la tétine est aussi destinée à l’usage des adultes. Comme dans le roman Le meilleur des mondes avec sa société parfaitement pacifique et cauchemardesque, Harari nous promet que les improductifs seront tenus en respect au moyen d’un mélange de cocktails de drogues et de divertissements… c’est-à-dire la paix artificielle pour le consommateur poussé au dernier stade : le toxicomane. 

  1. Puisque l’Union européenne est une création des États-Unis et que quoi qu’il en soit, Barack Obama en son temps s’était plusieurs fois prononcé contre le Brexit, ce qui signifie que l’Union de la Grande Bretagne avec l’U.E. ne faisait pas d’ombre aux E.U.
  2. https://www.youtube.com/watch?v=wzXoroOq6Qg&ab_channel=Dr.VSpineRachis

Illustration : Gerhard Glück

ANAGRAMME DE TRAUMAS*

Dans les premières pages de son livre Le réel et son double, le philosophe Clément Rosset nous raconte deux fables tournant autour d’une prophétie, et, presque involontairement, nous apprend qu’accepter qu’elles se réalisent peut s’avérer la meilleure manière de les conjurer.
La troisième histoire, une anecdote vécue, nous apprend que l’expérience peut nous amener à tirer des leçons similaires à celles de la mythologie.

PREMIÈRE PROPHÉTIE
Un vieillard craintif avait un fils unique plein de courage et passionné pour la chasse ; il le vit en songe périr sous la griffe d’un lion. Craignant que le songe ne fût véritable et ne se réalisât, il fit aménager un appartement élevé et magnifique, et il y garda son fils. Il avait fait peindre, pour le distraire, des animaux de toute sorte, parmi lesquels figurait aussi un lion. Mais la vue de toutes ces peintures ne faisait qu’augmenter l’ennui du jeune homme. Un jour s’approchant du lion : « Mauvaise bête, s’écria-t-il, c’est à cause de toi et du songe menteur de mon père qu’on m’a enfermé dans cette prison pour femmes. Que pourrais-je bien te faire ? » A ces mots, il asséna sa main sur le mur, pour crever l’œil du lion. Mais une pointe s’enfonça sous son ongle et lui causa une douleur aiguë et une inflammation qui aboutit à une tumeur. La fièvre s’étant allumée là-dessus le fit bientôt passer de vie à trépas. Le lion, pour n’être qu’un lion en peinture, n’en tua pas moins le jeune homme, à qui l’artifice de son père ne servit de rien.

DEUXIÈME PROPHÉTIE
Histoire de Sigismond : Basile, roi de Pologne, a dressé l’horoscope de son fils Sigismond lors de la naissance de celui-ci, et y a lu que les étoiles destineraient son fils à devenir le monarque le plus cruel qui ait jamais été dont le premier soin serait de retourner sa force sauvage contre son père pour le fouler aux pieds. Effrayé par ces augures sinistres, il fait enfermer Sigismond dans une tour isolée d’où celui-ci n’a aucune possibilité de contact avec les humains, mis à part son précepteur Clotalde. À sa majorité, il le libère pour un jour et le fait présenter à sa cour, afin de vérifier la vérité de l’horoscope. Rendu furieux par vingt années de captivité, Sigismond se conduit conformément à la prédiction. Ramené dans sa tour, puis bientôt libéré par une insurrection populaire, Sigismond – qui ne sait plus désormais s’il rêve ou s’il est éveillé – accomplit jusqu’au bout la prédiction de l’horoscope : ayant pris la tête de l’insurrection, il vainc son père, lequel n’a d’autre recours que de se jeter à ses pieds pour en appeler à son improbable pitié. Mais l’horoscope avait arrêté ses prédictions en cet instant, et, selon l’habituelle structure oraculaire, le drame se terminera de manière à fois inattendue et conforme à la prédiction […] : devenu sage par son doute quant au réel, Sigismond relève son père et lui rend les honneurs dus à son rang royal
Clément Rosset commente : « c’est l’acte même d’esquiver le destin qui vient coïncider avec son accomplissement. Si bien que la prophétie n’annonce rien d’autre que le geste d’esquive malencontreux. »
Contre tous les déterminismes, on peut en tirer très logiquement la conclusion qu’en décidant de ne pas empêcher d’advenir ce qui nous fait le plus peur, si la prophétie porte principalement sur « le geste d’esquive » , on peut empêcher ce qui nous fait le plus peur d’advenir, puisqu’il suffit qu’un des termes de la prophétie soit falsifié pour qu’elle soit annulée. Si par exemple, au moment où la prophétie advient, elle a été amputée de son pouvoir de nous effrayer, c’est comme si elle n’advenait pas. 

La troisième histoire n’est pas tout à fait une prophétie mais c’est sa conclusion qui l’y fait ressembler
Une personne que je connais m’a raconté ceci : 
– Un jour, alors que je travaillais avec un groupe de personnes, dont une avec qui j’avais été plusieurs fois en conflit, en raison d’une personnalité, on va dire, ombrageuse, cette personne (qui fait ici un passage trop bref pour qu’un pseudonyme nous soit de quelque utilité ; appelons-la X), peut-être parce que j’avais osé la contredire (et probablement pour bien des raisons qui n’avaient rien à voir avec moi), s’est dressée se mettant à vociférer : « Fais bien attention à toi parce qu’un jour, je pourrais bien te dire des choses susceptibles de te faire pleurer ! »
– Quelles choses ? 
– Eh bien je n’en avais aucune idée justement, et comme X et moi étions loin d’être proches – encore qu’il y ait une forme d’intimité, vaguement proche de l’affrontement physique, à se faire crier dessus – je ne voyais vraiment pas de quoi il voulait parler … À vrai dire, même si je n’en ai plus eu l’occasion par la suite, j’aurais été curieux de le savoir… Mais c’est finalement par quelqu’un d’autre que j’ai su de quelle nature étaient ces… révélations sur mon compte. 
– C’était quoi alors ? 
– Ça n’a aucune importance en fait… imagine le malentendu le plus extravagant, la manière la plus invraisemblable, reposant peut-être sur une forme d’outrecuidance, dont une personne vétilleuse puisse croire avoir découvert ton talon d’Achille. 
– Mais pourquoi tu ne me dis pas ce que c’est ? 
– Parce que c’est plus intéressant que tu puisses compléter cette anecdote avec une expérience personnelle. Disons qu’à la faveur d’un commentaire sur son apparence physique, X s’est mis dans la tête que je l’enviais ou quelque chose comme ça. Je ne me suis pas rendu compte de l’effet de ma plaisanterie, si bien que j’ai été vraiment surpris d’apprendre qu’elle avait frappé X au point qu’il la rapporte à notre connaissance commune…  
– Ah… et qu’est-ce qui s’est passé finalement ? Tu as fini par exposer ce type et les prétentions qu’il avait de connaître ta faille ? 
– Non même pas. Mais depuis que je sais à quoi il a fait allusion, depuis que je sais quelle méprise il a faite à mon sujet, et depuis que je sais comment, à chaque fois que j’y pense, je ris tout seul… parfois aux larmes. 
– X avait raison alors ? 
Ma réflexion l’a surpris : 
– Ah oui, m’a-t-il répondu d’un air songeur. 

Comme le narrateur de l’anecdote, qui pourrait être moi, à moins que ce ne soit moi qui ait un jour menacé quelqu’un de pouvoir le faire pleurer, ou qui aie enfermé mon fils dans une tour jusqu’à sa vingtième année (on peut raisonnablement supposer que si j’avais été tué par un lion, je ne serais pas en mesure d’écrire ceci), je préfère laisser le lecteur libre de son interprétation… 

* À la lettre disparue de Georges Pérec près. Je me comprends.

LES PROPOS CONSCIENTS DE JOANN SFAR

« Marguerite Duras n’a pas écrit que des conneries… Elle en a aussi filmé. » (Pierre Desproges) Ce n’est pas de Marguerite Duras qu’il sera question ici, mais de Joann Sfar, que cette phrase d’introduction rend inutile de présenter (si ce n’est qu’il a réalisé un remake ridicule et prétentieux de La dame dans la voiture avec des lunettes et un fusil, qui n’est pas le moindre de ses accomplissements).
C’est donc sur Radio J que Joann Sfar (grâce lui soit rendue) tenait les propos suivants :

« Maintenant que des étudiants voudraient, parce que tout le monde (1) veut la paix (2) au proche orient, maintenant que des étudiants voudraient participer à la réflexion sur le proche orient contre la guerre, tout le monde est contre la guerre, eh ben c’est difficile parce que toutes les trois phrases il y a des sous-textes (3) anti-juifs (4) que les locuteurs (5) ne sont même pas conscients (6) de proférer – moi je ne suis pas en train de dire que les pro-palestiniens sont anti-juifs (7), c’est l’inverse (8) – je suis en train de dire qu’il y a des jeunes gens qui sans le faire exprès (9) ont été éduqués à la Dieudonné ou à la Soral depuis 20 ans et sans le faire exprès (10), ils disent un inconscient (11) qui est pas audible (12) pour une oreille juive (13) parce que il y a eu une éducation à l’antisémitisme qui a pas été faite (14). »

  1. Même si « tout le monde » ne la veut pas de la même manière ni au même prix. 
  2. À la racine du messianisme juif, il y a la foi en le retour du messie, dans un monde pacifié. Pacifié comment ? Les versions divergent. la manière forte n’est pas exclue. Le président Netanyahu suit les consignes de rabbins qui lui rappellent régulièrement de hâter la venue du messie, qui doit être enfanté dans la douleur du monde (y compris dans les souffrances du peuple juif). Précisons que les juifs ultra-orthodoxes par exemple, ne sont pas sionistes ; c’est-à-dire qu’ils sont fermement opposés à toute intervention humaine dans la venue du messie. 
  3. Qu’est-ce qu’un sous-texte ? C’est une manière d’insinuer que le commentateur (ici l’auteur de bandes dessinées/cinéaste/écrivain/linguiste Joann Sfar) comprend mieux ce qu’ils disent que ceux qui le disent. Il le comprend tellement mieux qu’il les appelle « locuteurs », ce qui en impose.
  4. Notons que Joann Sfar évite de dire le mot antisémite (sans nous dire ce qui serait le plus grave : être anti-juif ou antisémite ; il est vrai que les Palestiniens sont un peuple sémitique, parlant une langue sémitique, ce qui mettrait Joann Sfar dans de beaux draps). Cet art de dire moins pour dire plus est une figure de rhétorique qui porte le joli nom de litote
  5. Remercions Joann Sfar pour l’emploi de ce mot avec son élégante précision. 
  6. Ajoutons “psychanalyste” aux nombreuses spécialités de Joann Sfar, capable, comme Moïse séparant la mer rouge, de distinguer ce qui dans des propos est dit consciemment et inconsciemment. Belle preuve d’honnêteté intellectuelle !
  7. Nous voilà rassurés !
  8. Ce que nous dit inconsciemment, de son propre aveu (« je ne suis pas en train de dire »), Joann Sfar, c’est que les anti-juifs sont pro-palestiniens et que d’ailleurs c’est parce qu’ils sont anti-juifs et pour aucune autre raison. Car leur haine doit se cristalliser sur une cause acceptable pour être socialement revendiquée. Il y en a dans l’inconscient de Joann Sfar ! 
  9. Si Joann Sfar reconnaît aux locuteurs la part d’inconscient contenue dans leurs propos, rien d’étonnant à ce qu’il sache aussi ce qu’ils ont voulu faire exprès et pas exprès. Je ne voudrais pas faire rougir Joann Sfar et sa modestie légendaire mais déclarer, comme il le fait, que c’est sans le faire exprès que des gens éduqués par Soral et Dieudonné régurgitent leur enseignement, c’est montrer une propension prodigieuse à l’effort surhumain. N’importe qui à sa place se serait contenté d’associer au nom de Soral ou de Dieudonné une défaillance passagère de la judéophilie (tactique pourtant éprouvée et d’ailleurs il n’y a pas de raison de bouder les recettes qui marchent).
  10. Si l’expression est répétée, c’est parce que la deuxième occurrence n’est pas tout à fait la même que la première ; on ne se baigne pas deux fois dans la même rivière (mais alors combien de fois ?). C’est bien en faisant exprès et consciemment que Joann Sfar ne dit pas la même chose en répétant « sans le faire exprès » ; ce qu’il dit cette fois-ci, c’est qu’il n’accuse personne parce qu’il est quelqu’un de gentil et de compréhensif et qu’il n’est pas un délateur. Et qu’il s’exprime consciemment. 
  11. Il est tellement bienveillant, Joann Sfar, qu’il rend un bel hommage à ceux qui « disent un inconscient » (c’est un exploit). Par modestie, il n’a pas poussé jusqu’à qualifier l’inconscient de “collectif”, ce qui l’aurait obligé à se reconnaître sociologue. 
  12. « Dit » mais « pas audible ». Parlons plus fort ou articulons, je ne vois que ça. 
  13. Laquelle ? La gauche ou la droite ? Il faut bien plaisanter un peu. Une « oreille juive » est une métonymie (nommer la partie pour le tout : une pour deux) mais aussi un amalgame, ce qui est strictement interdit… parfois. 
  14. L’art de la chute, le mot qu’on n’avait pas vu venir : « antisémitisme » (voir BONUS). Forme de racisme plus grave que le racisme, qui était originellement « théorie de l’inégalité des races » (théorie positiviste née à la faveur de la révolution bourgeoise). L’antisémitisme – et il a bien raison parce qu’on n’est jamais trop prudent – est la théorie de l’inégalité des racismes. 

Pour juger à quel point Joann Sfar parle consciemment, c’est ici :
https://twitter.com/F_antom_AS/status/1787792069219504164?ref_src=twsrc%5Etfw%7Ctwcamp%5Etweetembed%7Ctwterm%5E1787792069219504164%7Ctwgr%5E27c1261753771d2060a4f46b86788cc6b0879c8a%7Ctwcon%5Es1_c10&ref_url=https%3A%2F%2Fwww.egaliteetreconciliation.fr%2FUne-semaine-sur-Twitter-S02E19-75654.html

BONUS
Devinez anti-quoi a dit Alain Finkielkraut qu’était Guillaume Meurice ?

PAUVRES DE NOUS ! (Une analyse toxicologique du film Pauvres créatures)

Pauvres créatures (Poor things, 2024) de Yorgos Lanthimos est salué comme « un grand film féministe », c’est-à-dire un film qui s’en prend au « patriarcat », et naturellement recommandé comme tel, comme à chaque fois qu’est employé un mot fétiche (“féministe”, “démocratique”, “inclusif”…) qui n’a pas tant vocation à signifier qu’à entretenir un état de sidération et d’hypnose. 

ILLUSION DE LA PLURALITÉ
Sur le site de France Inter, un aperçu des critiques inoffensives de l’émission de Le masque et la plume confirme que la critique professionnelle n’a rien à voir avec l’exercice d’un véritable esprit critique (capable d’exposer des visées propagandistes sans forcément gâcher le plaisir du spectateur) et qu’elle en est un produit dérivé, une sous-production du cinéma et de la culture en général, la culture étant une des idoles, un des cultes, du polythéiquement correct démocratique. Un des critiques trouve à redire à l’abus des plans à image convexe ; une autre se réjouit qu’un personnage féminin «  s’émancipe des codes sans rien lâcher de ses désirs. » (conformité au culte du plaisir personnel) ; une autre encore déplore une tendance « à mettre en scène des femmes selon un regard d’homme » (conformité au regard “féministe” culpabilisant et castrateur qui tétanise toute la société occidentale)…  
Pauvres créatures contient de nombreuses scènes détaillant l’activité sexuelle débridée de son héroïne. Profitons-en pour réfléchir à l’épreuve pour l’actrice, consistant à se montrer dans de nombreuses scènes dégradantes. On sait que les acteurs ne sortent pas indemnes de leurs personnages ; dans une interview, l’actrice Sabine Azéma disait regretter qu’après une scène où elle a dû pleurer, il ne se trouve personne pour la prendre dans ses bras ; les bons acteurs ne font pas tout à fait semblant.
Pauvres créatures raconte une “émancipation” par la jouissance sexuelle, et assène donc une nouvelle couche de catéchisme moderne par la valorisation du corps plutôt que de l’esprit. Ce concept étrange ne peut se comprendre que dans un monde où le sexe est entré dans la vie publique et où il occupe littéralement désormais la vie politique. Ce monde, c’est le nôtre. Rappelons au passage la phrase de l’auteur Aldous Huxley : « Quand il n’y aura plus de libertés, il restera la liberté sexuelle ».

GÉNÉALOGIE FRANKENSTEIN
Pauvres créatures , qui se veut une variante sur le mythe transhumaniste de Frankenstein (contrôle de la vie, mythe du nouvel homme et divinisation de l’homme) s’ouvre sur le suicide d’une jeune femme, dont il s’avèrera qu’elle est enceinte. Son corps sera récupéré par un homme défiguré, Godwin, que tout le monde appelle “God” (donc : Dieu) et qui s’adonne à des expériences d’hybridation sur des animaux : poule à tête de porc, canard à tête de chien et chèvre à tête de canard. Ne nous y trompons pas, les animaux aberrants montrés dans ce film sont l’illustration grotesque d’un fantasme de contrôle total du vivant bien réel, qui figure au programme du Forum Économique Mondial et son projet de « fusion entre l’identité physique, biologique et numérique » (1). Fusion : confusion.
Le nom de Godwin n’est pas choisi au hasard : c’était le nom du père de Mary Godwin, future Mary Shelley, auteur de Frankenstein. William Godwin était l’auteur d’un essai révolutionnaire visant à réformer la société selon l’idéologie illuministe, qui ne reconnaît rien de supérieur à la raison et à l’humain ; dans la société ainsi fantasmée, le mariage (« le plus odieux des monopoles ») serait hors-la-loi, et le libertinage et le partage des concubines seraient la règle… La lecture de cet essai anarchiste allait marquer le poète Percy Bysshe Shelley qui finirait par rencontrer l’auteur et séduire sa fille, espérant fonder en version microcosmique un modèle de société socialiste utopique dans lequel l’échange des partenaires serait la norme. Soit dit en passant, si beaucoup de privilégiés comme Shelley ont été séduits par le socialisme utopique, c’est qu’ils devinaient que leur condition de privilégiés serait préservée. 
Pour revenir à Pauvres créatures, le choix de nommer Godwin (God = Dieu) un personnage qui manipule le vivant trouve aujourd’hui un écho concert dans les thèses de Yuval Noah Harari, conseiller du directeur du Forum Économique Mondial Klaus Schwab et auteur du best-seller mondial Homo Deus qui développe de manière idéologico-scientiste la promesse du serpent « Vous serez comme des dieux ». 

POUR UNE SEXUALITÉ ÉPANOUIE DE L’ENFANT ? 
L’héroïne de Pauvres créatures, Bella est donc une femme suicidée ressuscitée par un savant fou qui a greffé à la place de son cerveau celui de son bébé. Il n’est guère étonnant que la critique ne s’attarde pas sur ce détail perturbant : Pauvres créatures ne nous raconte pas l’itinéraire sexuel et “politique” d’une femme à la psychologie immature, mais d’une petite fille dans un corps d’adulte ; le film n’exploite le potentiel absurde de cette situation que pour faire oublier au spectateur qu’il assiste à des scènes de relations sexuelles entre des hommes et une petite fille de huit ans (dans un corps de femme). Dissonance cognitive, ce que voit le spectateur : des scènes sexuelles entre adultes, ne correspond pas à ce qu’il sait : qu’un des deux partenaires est une enfant.  Le film montre Bella à la fois comme un enfant qui utilise les hommes comme des jouets sexuels (ce qui est une perversion) et comme un modèle de femme libre (réduisant de nouveau la liberté à la liberté sexuelle)… 
Ce n’est que de la fiction ? Si le pouvoir ne prenait pas au sérieux ce qu’on appelle la “culture” (une des divinités républicaines) la CIA ne serait pas intervenue dans les programmes culturels américains et européens à partir des années 50 (voir l’essai de Frances Stonor Saunders Qui mène la danse ?)

LA PROSTITUTION AU SERVICE DE LA CAUSE FÉMINISTE 
Duncan, l’amant de Bella, qui voit d’un mauvais œil qu’elle échappe à son contrôle, lui soit “infidèle”, essaiera de la mettre en garde contre la prostitution.  Les auteurs du film ne semblent pas établir de distinction entre jalousie,  possessivité, et le désir de protéger une femme. C’est donc assez logiquement que les scénaristes envoient Duncan dans un asile d’aliénés. C’est le sort de ceux qui se mettent en travers de “la liberté des femmes”. La puissance – caverneuse et platonique – de l’illusion cinématographique consiste à nous faire croire que ce sont des personnages qui parlent (interprétés par des acteurs que nous adorons comme des divinités) alors que ces personnages sont l’interface entre nous et les puissances qui modèlent la matrice idéologique. Un peu comme elles utiliseraient des poupées de ventriloques. 
À Paris, Bella trouvera du travail dans une maison close (ses lectures philosophiques de femme éclairée ne semblent pas avoir d’autre résultat que de l’enchaîner à la chair), où la maquerelle verra en elle une femme « en train de tracer sa propre voie vers la liberté ». Elle encouragera Bella en ces mots : « Nous devons travailler, gagner de l’argent. Mais plus que cela, nous devons tout expérimenter. Pas seulement le bien mais aussi le dégradant, l’horreur et la tristesse. C’est ce qui fait de nous des êtres achevés, Bella » Traduction : « C’est ce qui fait de nous des êtres… morcelés, dissociés, fragmentés ». Soit dit en passant, le laïus de la maquerelle oppose « êtres achevés » à « enfants laissés intouchés », comme si la préservation de l’innocence des enfants était un mal.
Rappelons que ce discours “d’émancipation” est tenu par quelqu’un dont « l’intérêt bien compris »  (selon la formule de l’économiste libéral Adam Smith) est directement lié à l’exploitation sexuelle des corps, qu’elle appelle « accomplissement personnel ». C’est peut-être dans la même optique que le mage sataniste Aleister Crowley estimait qu’un enfant devait avoir été exposé à toutes les formes de sexualité ; et que sous les pavés de ces bonnes intentions, l’OMS promeut ce programme de Droits sexuels des enfants (sic). Le film montrera d’ailleurs Bella ayant des relations sexuelles avec un père en présence des enfants de celui-ci.

VERS LE MEILLEUR DES MONDES 
In fine, c’est le plus naturellement du monde que Bella va entamer une relation amoureuse avec une autre prostituée, une belle jeune femme noire, qui se dit socialiste, et convertit Bella à sa cause en lui expliquant qu’elle veut “améliorer le monde”. Le mot socialisme peut sembler tomber comme un cheveu sur la soupe dans un film de divertissement, même adressé à un public “cultivé”. Le spectateur n’a pas l’habitude de voir la propagande avancer à visage découvert. Or il faut rappeler d’une part que la population occidentale est visée depuis quelques années par un programme affiché sur le site du Forum économique mondial (2). La banalité du mot socialisme, le fait qu’il soit devenu pour les professionnels de la politique (sans oublier les professionnelles) une simple étiquette servant à canaliser les flots de bulletins en période électorale, ne doit pas faire perdre de vue que le socialisme utopique prétend instaurer sur terre une société idéale, un paradis terrestre, scientifiquement mesuré et quantifié (voir à ce sujet les projets de Jeremy Bentham et ceux de Charles Fourier). Il serait encore plus imprudent d’ignorer que les héritiers et les manifestations programmatiques actuelles de ce socialisme ne retiennent plus de l’utopie que la notion de contrôle total. Dans cette société, le citoyen idéal est le sujet infantile esclave de ses pulsions, qui confond les mots (“féministe”, “libre”, “socialiste”…) avec l’emploi frauduleux qu’en fait un pouvoir pervers et manipulateur. 

(1) www.youtube.com/watch?v=v5y4hc6vPTs&t=7s

(2) Programme épousant la logique de la table rase, repris par les “chefs d’État” – comprendre : hommes de paille au service des entités qui dictent leurs volontés aux multinationales via Blackrock et Vanguard –, et le peuple ; ces visages et leurs discours hypnotiques servent à entretenir l’illusion “démocratique” dans un monde matriciel où les mots ne signifient pas la même chose pour le pouvoir qui les émet que pour le peuple à qui ils sont destinés. Premier commandement : « Vous ne posséderez rien et vous serez heureux. » : www.youtube.com/watch?v=PckRXcgmbfI

TOXICOLOGIE : L’ART CONTEMPORAIN DE SE FOUTRE DE NOTRE GUEULE

L’art contemporain s’est fait une spécialité d’insulter l’œil et l’intelligence. On peut parler d’une sorte de viol intellectuel. Ce ne serait rien sans la rhétorique perverse qui lui sert de cuirasse. Sous des dehors futiles, vite démentis par les prétentions de ceux qui le font et ceux qui le défendent, sa vocation est de s’attaquer au sens.


Installé sur le parvis de la place Beaubourg en 2017, l’œuvre Domestikator est une “sculpture” visitable de 12 mètres de haut constituée de blocs rouge façon Lego qui évoque un couple en position de levrette (description faite par le très sérieux journal Le Figaro). La position en apparence paradoxale de l’art est sa prétention à faire réagir, tout en s’offusquant lorsqu’il fait réagir. Cela donne des offensives verbales comme celui que je vais citer dans une version abrégée, signé d’une certaine Anne-Marie Morice. On transposera aisément dans le domaine de la politique ou de la grande entreprise un texte qui se manifeste par la négation du point de vue de l’autre.  Ce verbiage ne contient pas un mot en trop : indice toxique élevé.

« Cette sculpture (1) […] fut refusée par le Louvre […]. De son côté la Société protectrice des animaux avait dénoncé le fait que cette œuvre représenterait “un acte zoophile”. (2)
“L’œuvre de l’Atelier Van Lieshout est une magnifique utopie (3) en prise avec l’espace public. Elle est spirituelle (4) et crée un lien évident (5) entre l’abstraction et la peinture figurative qui co-existent dans l’art hollandais du 20e siècle.”, a rétorqué avec une certaine finesse Bernard Blistène, Directeur du Centre Pompidou, Paris.
“Le Domestikator a l’intention d’être un catalyseur de pensée et d’opinion (6), puisqu’il pose la question, etc.” […]. 
L’artiste estime que le désir de contrôle développé par l’humain (7) se place dans une démarche de sécurisation du monde (par l’éducation, la protection sociale, la culture aseptisée (8)…). En contrepartie elle nous prive de plus en plus de notre intelligence, de notre créativité et nous contraint à accepter des apories comme le fait de faire co-exister dans nos “valeurs” l’amour des animaux et de la nature et l’exploitation de ces mêmes animaux pour notre alimentation. (9) […]  D’où la règle formelle (10) mise en place par l’artiste, [qui] évoqu[e] l’usine (11), la reproduction totale à l’identique, l’indifférenciation.
Cette œuvre s’inscrit dans la longue tradition de l’art à susciter des affects [et] ces œuvres offrent maintenant l’occasion à certaines populations de réagir violemment (12), par des affects négatifs de rejet de l’oeuvre (13), au nom de théories (14) qui de leurs points de vue (15) sont positives comme le bien-être animal, ou l’interdiction de signes sexuels dans l’espace public (16).
[La désapprobation est] : primaire et populiste. Ce public à courte vue s’arrête au stade de la représentation (17) alors que l’artiste cherche à provoquer des réactions émancipatrices (18) par l’humour (19), le décalage (20), la monumentalité, l’audace, l’énorme (21). Les services de presse et de médiation […] devraient […] restitu[er] la complexité des intentions de l’artiste (22). La présentation précédente de cette pièce en Allemagne a rencontré un grand succès populaire. (23)
Mais [le plus inquiétant] est l’interprétation étroite et malveillante […] faite du motif sexuel de l’oeuvre. La position de la levrette […], n’est-elle pas un acte souvent pratiqué dans les foyers ?  (24) […] nous assistons à une réapparition de plus en plus marquée d’une prétendue pudicité qui veut museler […] tout un chacun dans ses pratiques les plus intimes, (25)… »
Anne-Marie Morice

(1) Dans la langue civilisée, le sens des mots est associé à leur définition. En art contemporain, le sens ne naît que de l’indéfinition. Tout est “sculpture”, ce qui pue tout de même le complexe d’infériorité. Pour mériter d’être l’auteur d’une sculpture, deux possibilités : se hisser à la hauteur de ses prédécesseurs… ou détruire le sens du mot. Comme nous dit dans une publicité un influenceur qui boit du champagne sans bulles, « La question, elle est vite répondue ».

(2) Les protestations émanent souvent d’associations spécialisées. Dans ce cas précis, on voit mal ce que la “sculpture” fait de mal à la cause animale. Les associations sont bien obligées de faire parler d’elles. 

(3) L’emploi du mot « Utopie » à propos de cette œuvre est peut-être à mettre sur le compte d’une bouffée délirante. À partir du moment où la représentation au premier degré entre dans la réalité pour être justifié par les autorités culturelles, nous sommes bien dans la dystopie. Comme à chaque fois que l’utopie se réalise. 

(4) « Spirituelle » Il s’agit là d’un cas de satanisme verbal, c’est-à-dire d’inversion des valeurs.  Il s’agit toujours de sidérer par l’énormité du propos ; pendant que le public cherche à comprendre ce qui a été dit (puisque c’est le réflexe des gens honnêtes), le poison agit. 

(5) « Évident » = qui ne se voit pas, qui a besoin d’être expliqué : nous avons affaire ici à un ésotérisme artistique et verbal. L’art contemporain est ésotérique, son sens est caché, réservé aux incantations de la « pléthorique domesticité » (expression de Guy Debord) culturelle. 

(6) “catalyseur d’opinion”… Cette métaphore médicale préfigure un hygiénisme intellectuel qui a pour fonction de trier le bon grain de l’ivraie

(7) L’art contemporain vise toujours les forces obscures nichées dans les individus. Il ferait beau voir qu’il s’attaque au véritable pouvoir que, pour se croire libre, il doit croire le fruit d’une hallucination collective, alors que les artistes officiels (dans le sens le plus large du terme : tous les artistes qui ont accès aux médias et aux subventions) sont ceux qui le subissent le moins. 

(8) « Aseptisé » ? Le commentaire viserait-il l’esthétique chirurgicale des salles d’exposition d’art contemporain ? 

(9) La posture moralisatrice est typique des tartuffe. Rappelons que la « sculpture » représente une scène pornographique telle qu’elle apparaîtrait sur une console de jeu des années 80.

(10) Traduite en langue frontale, l’expression « règle formelle » désigne en réalité la manière d’enculer des mouches contribuables non consentantes et le choix du type de carambouille présenté comme signe de vie culturelle. Nous avons affaire à un dispositif d’extorsion de l’approbation. 

(11) « Usine » ! Il y a ici confusion entre fabrication et transport ; il est vrai que le monde de l’art affecte une certaine hauteur par rapport à ces trivialités. 

(12) Pourquoi est-ce toujours aux princesses au petit pois qu’on s’en prend toujours « violemment » ? (la réponse est dans la question)

(13) « des affects négatifs de rejet de l’oeuvre »… On sent que l’auteur se fait violence à évoquer des comportements aussi frustes. 

(14) Non pas des arguments, mais des « théories » ; le choix du mot est particulièrement condescendant. 

(15) Point de vue du pouvoir : objectif ; point de vue du peuple récalcitrant : subjectif, gouverné par l’erreur

(16) Ne pas croire que l’art contemporain, aussi inepte soient ses manifestations, soit inoffensif : l’aveu est fait ici du désir de la disparition de la séparation entre sphère publique et sphère intime. Ce n’est pas parce qu’on y est habitué qu’on est nécessairement aveugle à l’inversion satanique qui enferme les pratiques religieuses et spirituelles mais expose les pratiques sexuelles au nom de la liberté. Cette liberté n’est que le cache-sexe de la prédation et de l’homme esclave de ses désirs. 

(17) le public bloqué « au stade de la représentation » a au moins le mérite de ne pas confondre représentation et réalité. Tandis que les offices incessants du clergé culturel ont pour but de persuader que les réalités inférieures représentées servent une réalité supérieure invisible. 

(18) L’art émancipe de force et « La liberté, c’est l’esclavage ». Notons que si l’artiste échoue, c’est bien évidemment la faute du public. 

(19) Il est facile de prendre la moquerie et la méchanceté pour de l’humour… tant qu’on n’en est pas la cible. 

(20) Entretien de l’inadéquation entre le mot et la chose, le lieu et la fonction, les intentions et le résultat : bref : destruction du sens au détriment des non-initiés. Tout le projet de la “république” (res publica, en réalité détournée par les intérêts privés) est résumé ici. 

(21) « énorme »… Il semble qu’une observation juste se soit malencontreusement glissée dans le texte. 

(22) « Les services de presse et de médiation […] devraient […] restitu[er] la complexité des intentions de l’artiste » : les spectateurs protestent-ils ? C’est qu’on ne leur a pas assez bien expliqué. Traduction : On ne s’était pas rendu compte à quel point ils étaient cons. 

(23) Le pas de l’oie, en Allemagne, aurait-il été remplacé par la course désordonnée de multitudes de poules sans tête ? 

(24) « La position de la levrette […], n’est-elle pas un acte souvent pratiqué dans les foyers ? ». Volonté de faire disparaître la frontière entre public et privé, entre l’intime et le public. Qui confond ici la représentation et l’acte réel ? 

(25) « Nous assistons à une réapparition de plus en plus marquée d’une prétendue pudicité qui veut museler […] tout un chacun dans ses pratiques les plus intimes ». Censurer l’art c’est censurer la vie. Il est intéressant que l’article reproche au public borné de s’arrêter à la représentation pour avouer enfin que « l’œuvre » représente exactement ce qu’a vu le public de mécréants.

Illustration : Bernard Glück

LES ENNEMIS DE L’HUMANITÉ… NE SONT PAS NOS AMIS

LES ENNEMIS DE L’HUMANITÉ
J’ai assisté récemment à une scène amusante dans une librairie généraliste. Un client demandait à la responsable du rayon des sciences humaines de lui conseiller un livre qui permette de prendre un peu de hauteur par rapport aux principaux dogmes religieux. La jeune femme, un peu embêtée, a réfléchi, avant de proposer : 
– Peut-être dans la section Laïcité ? 
– Ça m’étonnerait, a répondu le client en riant un peu. 
Les ennemis de l’humanité de Lotfi Hadjiat est un des livres que je recommanderais à ce client comme à la libraire, ainsi qu’à toute personne qui aurait envie de résoudre le paradoxe apparent dans la citation de Chesterton : « Le fou est celui qui a tout perdu sauf la raison ».  Et qui a pris le pouvoir, pourrait-on ajouter…  

RELATIVISME ET FIN DES TEMPS
À une époque où la question du bien et du mal est diluée dans le relativisme, et confisquée par la religion du politiquement correct (1), où l’étrange personnage de l’Élysée évoque l’arrivée de « la bête de l’événement » (2), il est plus que jamais essentiel de se pencher sur cette question, mais aussi sur celle de l’origine du mal et ses manifestations, de la nuit des temps à aujourd’hui. Les ennemis de l’humanité, essai de 120 pages suivi d’aphorismes et d’articles aussi riches d’enseignement que corrosifs, tire à boulets rouges d’une part sur l’arrogance anti-spirituelle des sociétés occidentales matérialistes (3), et d’autre part sur l’ossification dogmatique des grandes religions monothéistes… Une clé possible pour ce texte luxuriant comme le paradis perdu pourrait être fournie par l’aphorisme suivant : « La vérité est simple, c’est le mensonge qui la rend complexe, occulte, inaccessible, spectaculaire, délétère. » Or une des définitions du diable est « le père du mensonge » et la ruse du diable, c’est de réussir à faire croire qu’il n’existe pas. Il se manifeste incognito par la confusion, la division, la concurrence des egos dévorants et des orgueils meurtriers, de la figure de Caïn exhumée par l’auteur, jusqu’à sa descendance actuelle. L’eschatologie (la théorie de la fin des temps) se révélant par la langue fourchue d’un président de la république, ce serait une erreur de l’ignorer. D’ailleurs, la république prend très au sérieux ce qu’elle appelle des « superstitions » depuis au moins la révolution française, puisqu’elle les combat au lieu de les ignorer. 

ORTHODOXIE, DOGMES, HÉRÉSIES
Aucune des trois religions abrahamiques n’échappe à l’entreprise critique de Lotfi Hadjiat, hérésies islamiques, suprémacisme du judaïsme et de sa branche politique, le sionisme (dont les Palestiniens, mais aussi les juifs font les frais), et centralisme du pouvoir catholique. Lotfi Hadjiat analyse et pulvérise certains dogmes, comme celui de l’infaillibilité pontificale (et son orgueilleuse origine paulinienne), absurde puisque rien de ce qui est humain ne saurait échapper à l’erreur… « Le véritable esprit des traditions est commun aux religions, il est enfoui sous les dogmes et les rites ». 
Le lecteur sceptique apprendra peut-être que les questions spirituelles ne sont pas extra-terrestres pour autant, que l’histoire falsifiée (y compris l’histoire au jour le jour écrite elle aussi par les vainqueurs via les agences de presse) est érigée au rang de vérité révélée, que le fanatisme n’est pas celui qui est désigné en permanence par les pouvoirs et « la pléthorique domesticité » (formule de Guy Debord) des médias et des intellectuels occidentaux : « [Les] Onfray, Redecker, Zemmour… ces menteurs professionnels, payés pour faire l’amalgame criminel avec la majorité des musulmans qui ne demande qu’à vivre en paix… ces insectes haineux qui ne parlent que des fous d’Allah pour ne pas parler des ultra fous de Sion qui suscitent et arment les fous d’Allah. » (5) Car les fous, les fanatiques sont d’abord ceux qui voient partout des intolérants et des fanatiques. 
Je retiendrai une autre catégorie de fous recensée par Lotfi Hadjiat : « les fous d’eux-mêmes », parmi lesquels les identitaires, aveuglés par les reflets dans leur rétroviseur, mais aussi tous les narcissiques encouragés par la société du spectacle intégral. 

RELIGIONS SANS DIEU ?
Lotfi Hadjiat se place sous la tutelle de Spinoza, philosophe d’origine juive jugé hérétique par ses coreligionnaires, qui revendiquait la liberté de penser, considérait que la bible était un livre falsifié et incohérent, mais qu’il était possible d’y déceler l’esprit de la vraie religion « pour peu, commente l’auteur, qu’on vise l’esprit derrière la lettre ». Car « Le véritable esprit des traditions est commun aux religions, il est enfoui sous les dogmes et les rites ».
Les dogmes contemporains quant à eux, ne sont pas religieux au sens classique (selon un préjugé laïque, qui se croit au-dessus des religions traditionnelles) et Lotfi Hadjiat n’oublie certainement pas l’athéisme démocratique ; athéisme dont on comprend qu’il est un terme inexact car la modernité tend à diviniser des notions d’essence non divine (à commencer par la modernité elle-même, mais aussi la science, le Capital pour les marxistes) tandis que le républicanisme a lui aussi ses hérétiques : tous ceux qui contestent son autorité, qui refusent de s’adonner à la croyance aveugle en la science (en laquelle il nous a été ordonné de croire à partir de 2020). 
On ne s’étonnera donc pas du sort que Lotfi Hadjiat fait à la modernité : « Les lumières de la science moderne font briller orgueilleusement la résistance au divin, la résistance acharnée à la mort, la mort matérielle, et cette résistance entêtée est appelée “liberté”, par la franc-maçonnerie notamment. » (4) Autant dire qu’on est loin des débats indigents qui rendent les religions responsables de tous les maux de la terre, oubliant volontairement que les révolutions modernes, française, bolchevique, turque ont donné lieu à d’innommables massacres rappelant dans leur déchaînement les orgies sacrificielles des derniers temps mayas… 
Inutile de dire que ces Ennemis de l’humanité détonnent dans une harmonie “démocratique” où toute contestation est diabolisée et calomniée, où il n’y a plus jusqu’aux porteurs de virus qui ne soient traités en hérétiques (égalité enfin atteinte sous le régime du soupçon universel). Tandis que, nous explique Lotfi Hadjiat, « Dieu n’oblige à rien, Il recommande, Il conseille, Il prévient de Sa justice implacable, pour nous mettre face à notre responsabilité, à notre conscience et à notre liberté. » Autant dire que cette liberté n’est pas la “liberté” républicaine, dont Balzac dans La vieille fille, nous disait déjà que le nom est « si mal défini, si peu compris ». Il est d’ailleurs dans l’intérêt du pouvoir qu’elle reste floue, à l’état de formule hypnotique gravée dans la pierre et dans les consciences, objet d’une interrogation obnubilante, et à l’état de discutailleries oiseuses et pseudo-philosophiques (« Apprenez à l’esclave à s’interroger sur son désir d’être libre et il ne se libérera pas. » nous dit Chesterton). 

Le livre de Lotfi Hadjiat apporte peut-être un début d’antidote à cet emprisonnement (empoisonnement ?) mental, quitte, notamment dans la manière dont il pulvérise des tabous du politiquement correct, à soumettre ses lecteurs à un traitement de choc. 

Les ennemis de l’humanité est publié par les excellentes éditions Fiat Lux.
http://www.editionsfiatlux.com/?product=les-ennemis-de-l-humanite

(1) Avec le républicanisme, le démocratisme, l’athéisme, l’antiracisme, le scientisme, etc., le politiquement correct fait partie du polythéisme moderne (polythéiquement correct ?). Précisons au passage que contrairement à la morale traditionnelle, qui suppose qu’on s’examine, les adeptes du politiquement correct et de ses manifestations, l’antiracisme la lutte contre l’antisémitisme, l’homophobie, etc. s’amnistient en désignant toujours le mal chez les autres, ce qui est bien commode. 
(2) Voir ici l’étrange déclaration (une des très nombreuses) d’Emmanuel Macron :  www.youtube.com/watch?v=m8sOuEmWK5c&t=1s
(3) Contrairement à une opinion répandue, comme j’ai eu l’occasion de le constater récemment, la définition du matérialisme n’est pas qui produit des biens matériels. Il en existe plusieurs définitions : le fait de ne reconnaître aucun principe supra-humain, la soumission à la raison (déficiente si elle n’est pas associée au cœur) ou encore le fait de considérer le phénomène de la vie comme une « chaîne de causalité sans finalité ». 
(4) Avec sa précision chirurgicale, Lotfi Hadjiat écrit dans son blog : « Il n’y a jamais eu de république “française” mais une république universelle s’installant en France par la force et dans le sang et détruisant le particularisme français ethnique, religieux et culturelle, détruisant tout ce qui faisait la France. Après avoir colonisé la France de l’intérieur, la république universelle colonisa l’Algérie… Finalement l’Algérie ne fut pas colonisée par la France mais par la république universelle. » À l’intention des curieux, la république universelle est celle théorisée par l’utopiste fanatique Anacharsis Cloots. 
http://leblogdelotfihadjiat.unblog.fr/2023/11/30/le-poison-de-luniversalisme-republicain-par-lotfi-hadjiat/
(5) En occident, le terrorisme ne saurait être qu’islamiste ; il est en fait manipulé par les services secrets, répartis entre la Couronne britannique, la CIA et le Mossad. Voir ici les analyses de Jacques Cheminade : www.youtube.com/watch?v=N8WOpLgdCug
http://leblogdelotfihadjiat.unblog.fr/2023/11/30/le-poison-de-luniversalisme-republicain-par-lotfi-hadjiat/

TOXICOLOGIE DU LANGAGE : AGENDAS PONCTUELS ET PERPÉTUELS DE LA PROPAGANDE (2/2)

PSYCHIATRIE, INGÉNIERIE ET MANIPULATION DES MASSES : DE LA WELLINGTON HOUSE À L’INSTITUT TAVISTOCK
Le site Noach.es explique que dans son essai Public Opinion (1922), Walter Lippmann, qui étudie la manipulation de l’opinion publique, constate que la démocratie a vu la naissance d’une nouvelle forme de propagande, basée sur les recherches en psychologie associées aux moyens de communications modernes. C’est Lipmann qui invente alors l’expression « manufacture of consent » qui signifie littéralement la « fabrique du consentement ». C’est de ce type de constat que naissent des organismes comme l’Institut Tavistock. 

THÉRAPIES INDIVIDUELLES OU CONTRÔLE DES MASSES ?
La psychologie et la psychiatrie sont aujourd’hui des éléments ordinaires du paysage social et mental il n’est pas inutile de rappeler d’une part : 
– Que l’émergence de la psychiatrie doit beaucoup à l’évolution induite de la médecine par la Fondation Rockefeller, avec l’appui du rapport Flexner, qui a amené à la marginalisation et la quasi-disparition d’une multitude de pratiques traditionnelles et ancestrales (enseignées jusqu’alors dans de nombreuses écoles) et à un monopole de la médecine allopathique ou “moderne”, qui traite le patient non plus comme une personne (4) mais, et de plus en plus, selon des protocoles standardisés et impersonnels, comme une machine biologique, analysée de manière électronique et “réparée” par la chimie ; et c’est ainsi qu’on traiterait les cyborgs (organisme électronique humanoïde), si les cyborgs existaient ;
– Que la psychologie, a priori inoffensive, ne va pas sans son corollaire, la psychologie expérimentale, qui loin de vouloir améliorer le bien-être des individus, applique des protocoles standardisés à des groupes, et qu’elle a servi au perfectionnement de la torture et du conditionnement mental (5).  
Quelles que soient les intentions qui ont animé l’évolution de la psychiatrie et de la psychologie, il faut garder à l’esprit qu’à partir du XIXe siècle, la science allait prendre la place laissée plus ou moins vacante par la religion (et le régulateur de la morale traditionnelle, présent dans toutes les civilisations), plus précisément par la séparation entre religion et pouvoir, et favoriser le développement du fantasme de toute-puissance de l’homme moderne (contrôle de la nature, contrôle de l’humanité, contrôle de la vie et de la mort). On peut vérifier la continuité de ce fantasme, du mythe de Frankenstein à Yuval Noah Harari et son Homo Deus – sans oublier son représentant français Laurent Alexandre, qui parle le plus sérieusement du monde d’ « euthanasier la mort ». 
Dans une société sécularisée, où la science et le progrès tiennent progressivement lieu de figures divines (de totems verbaux, en fait), il est dans l’ordre des choses de réinventer la morale traditionnelle : 
« Dans les années quarante, les figure de proue de la psychiatrie proclamèrent leur intention d’infiltrer le champ de l’éducation et du droit pour amener à […] l’éradication des concepts de bien et de mal. » G. Brock Chisholm et le psychiatre John Rawlings Rees, cofondateurs de la Fédération mondiale pour la santé mentale (WFMH : World Federation for Mental Health) le dirent abruptement à leurs pairs à l’époque : “Si l’espèce humaine doit être délivrée du fardeau invalidant du bien et du mal, ce sont les psychiatres qui doivent prendre cette tâche en main.” » (source en anglais : www.cchr.org.uk/undermining-morals/). La même source nous apprend que Brock Chisholm, qui deviendrait le premier directeur général de l’OMS, déclarait que « pour [accomplir] le gouvernement mondial, il est nécessaire de retirer de l’esprit des hommes leur individualisme, leur loyauté envers les traditions et leur identification envers leurs nations ». 

CRÉATION DE L’INSTITUT TAVISTOCK DES RELATIONS HUMAINES
À partir de 1921, le Bureau britannique pour la propagande de guerre deviendrait l’Institut Tavistock des relations humaines (sic), un peu comme le ministère français de la Propagande deviendrait naturellement celui de l’Information. 
Dans son indispensable et vertigineuse synthèse parue en 2019 Le Nouvel ordre mondial démasqué, Cyril Leysin nous apprend incidemment que plusieurs membres du groupe composant l’équipe de l’Institut Tavistock avaient suivi une formation psychanalytique. Une des personnalités qui eut le plus d’influence sur les travaux de l’Institut était Kurt Lewin, qui « affirmait que la société pourra[it] être […] menée progressivement vers un état d’esprit infantile, immature, et labélisa cette sorte de chaos social sous le terme de “fluidité” ». Cyril Leysin précise que cette notion anticipe celle de “tittytainment” (contraction de “titty” mot familier qui désigne les seins et correspond au vocable “nichon”, et “entertainment”, divertissement), inventée par l’éminence grise des présidents américains de Carter à Obama, Zbigniew Brzezinski (1928-2017). Le “tittytainment” se définit par « l’omniprésence de divertissements abrutissants et la satisfaction des besoins primaires, mélange d’aliments physiques et psychologiques, censés endormir les masses tout en contrôlant leurs frustrations et leurs protestations éventuelles. »
Dans sa préface au Meilleur des mondes, Aldous Huxley (dont le frère Julian Huxley serait respectivement le créateur et le premier directeur des organismes mondialistes WWF (World wildlife fund) et UNESCO), écrit que  : « À mesure que diminue la liberté économique et politique, la liberté sexuelle a tendance à s’accroître en compensation. Et le dictateur (à moins qu’il n’ait besoin de chair à canon et de familles pour coloniser les territoires vides ou conquis) fera bien d’encourager cette liberté-là. » On omet systématiquement de rappeler qu’en plus du tableau d’une société entièrement conditionnée par l’eugénisme, Le meilleur des mondes est une dystopie où la famille est une institution dangereuse qui n’existe plus que dans des zoos humains, et où les “individus” sont encouragés à avoir des relations sexuelles les uns avec les autres (comme dans le roman Nous autres d’Eugène Zamiatine, le précurseur du Meilleur des mondes) et à s’étourdir régulièrement grâce à des cocktails de drogues. 
La tyrannie technocratique adopte donc les traits d’une maternité abusive et incestueuse, dans le sens fusionnel et non dans le sens sexuel de ce mot, car la fusion entre l’enfant et la mère n’est rien d’autre que l’indistinction, le contraire de l’individuation (c’est-à-dire la possibilité pour l’être dépendant de devenir autonome). Dans son indispensable essai Gouverner par le chaos, Lucien Cerise décrit la tyrannie technocratique comme un immense utérus artificiel, c’est-à-dire dénué de frontières (6) et de contradictions ». Encore une fois la fiction, avec la série de films The Matrix s’impose comme un reflet fidèle des ambitions démiurgiques du contrôle par la science. Lucien Cerise explique aussi que cette tyrannie sécuritaire et matricielle est le projet d’individus sincèrement persuadés de mener l’humanité vers un avenir exempt de tout conflit ; ainsi le directeur du World Economic Forum Klaus Schwab (7) est un pacifiste convaincu – même si la sagesse populaire est, en théorie du moins, armée pour se défier des pavés de bonnes intentions… 
Plus près de nous, le cyber-technocrate fanatique et auteur du livre à succès : Homo Deus, Yuval Noah Harari, considère que l’humain est devenu « piratable » à partir du moment où une organisation le connaît mieux qu’il ne se connaît lui-même. Selon le même douteux personnage, le libre arbitre (notion importante dans le christianisme, dont une des définitions est la possibilité de choisir entre le bien et le mal) est voué à disparaître et où les improductifs seront maintenus sous contrôle par un cocktail de drogues et de divertissements. 
Précisons que les fanfaronnades d’Harari et de l’idéologie qu’il incarne ne sont pas vaines puisque c’est le peuple israélien lui-même qui a expérimenté le premier l’utopie devenue réalité dystopique du “passe vaccinal”. 

CONCLUSION
Depuis des décennies, la propagande, ou ingénierie sociale est omniprésente mais rendue presque invisible à la majorité de la population par l’emploi abusif du mot démocratie et l’expression cache-sexe communication politique (9) par les dirigeants des pays membres de l’Union européenne et par sa présidente multi-corrompue. Cette médiocratie ou cacocratie (gouvernement des pires) infantilise les populations (syndrome de la mère abusive), traite les “citoyens” comme s’ils étaient présumés coupables de ce qu’elle nomme arbitrairement pandémie et réchauffement climatique, tandis qu’elle amnistie systématiquement les multinationales pollueuses et esclavagistes, promeut le consentement sexuel pour les enfants et les mineurs (9). Seul le mot “démocratie” avec ses vertus hypnotiques résiduelles parvient encore à faire oublier la nature véritable de ce régime : l’exercice permanent d’un pouvoir devenu abusif qui a retiré aux adultes toute possibilité d’exercer leur consentement en pénalisant toute forme de contestation par le chantage affectif (« sauver la planète »), la culpabilisation (« antivax », « complotiste »), des amendes et des privations de droits. Mais si ces instituts et les gouvernements qu’ils guident étaient tout-puissants, ils n’auraient évidemment pas besoin du secret ni déguiser leurs projets sous des intentions faussement bienveillantes.
Ludovic Joubert

Toxicologie du langage est disponible sur le site Le livre en papier : 

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NOTES
(4) Si la pratique de la médecine jusqu’au début du XXe siècle pouvait aussi fournir un terrain au charlatanisme et à l’escroquerie, comme d’ailleurs la plupart des activités commerciales, que dire de la médecine moderne, élevée au rang de quasi-monopole, dont les compagnies pharmaceutiques produisent elles-mêmes les études des produits qu’elles mettent sur le marché, où les patients captifs servent de sujets d’expérimentation (quand ce ne sont pas des populations africaines) et dont la cupidité au service d’intentions encore plus suspectes, mènera à partir de 2021 à l’injection contrainte d’un produit inconnu et expérimental, tandis que les gouvernements du monde libre enjoignent les sujets de l’expérimentation à « croire en la science » (“Aie confiansssse” chante, dans Le livre de la jungle, le serpent, qui pourrait désormais aussi bien remplacer celui du caducée). 

(5) Sur ce sujet, je recommande tout particulièrement les films The Mandchurian candidate (deux versions : 1962 et 2004). Il faut à la presse grand public de très bonnes raisons pour exposer les opération de contrôle mental et c’est le succès de la série de Netflix Stranger things qui inspire à Radio-France cet article expliquant que la série est largement inspirée du programme MK-Ultra (www.radiofrance.fr/franceinter/stranger-things-le-projet-secret-de-la-cia-qui-a-inspire-la-serie-netflix-1430600). Incidemment, le 3 octobre 1995, face à l’accumulation de révélations, le président américain Bill Clinton a été contraint de formuler des excuses publiques concernant les expériences ayant eu lieu sur le sol américain (voir page Wikipédia : projet MK-Ultra ; pour un exemple concret de “programmation” humaine, voir la page Wikipédia concernant une certaine Candy Jones, mannequin et agent du gouvernement recrutée, comme beaucoup de stars de Hollywood, en raison de sa fragilité, induite par une enfance traumatisante : fr.wikipedia.org/wiki/Candy_Jones). 
Depuis que le philosophe Descartes a introduit le ver de la machine dans le fruit de la vie (théorie de l’animal machine), on a rendu les techniques scientifiques (comprendre : standardisées) effectivement capables de traiter l’humain comme une machine de précision. Il ne faudrait pourtant pas en déduire que l’humain est une machine ni que la vie est une mécanique (de fait aucune expérience scientifique n’a à ce jour réussi à reproduire : “l’étincelle de vie”) ; ce qu’il faut garder à l’esprit, c’est que pour que cette mécanisation puisse avoir lieu, il faut qu’il y ait eu déshumanisation ; celle-ci peut se faire sans violence physique, de manière ordinaire dans le monde de la bureaucratie publique et privée, en empêchant la personne, par exemple dans le cadre d’un contrat professionnel, d’exercer sa spontanéité et son imagination ; elle peut se faire aussi dans le cadre de la violence étatique et des services secret, par exemple dans le cadre de programmes MK-Ultra de la CIA, qui est un des rejetons monstrueux de la volonté de contrôler la nature et l’humanité par la science. 

(6) Il faut entendre ici toutes les sortes de frontières possibles et imaginables : géographiques bien sûr mais aussi sexuelles, générationnelles (disparition de la distinction entre adulte et enfant), morales (dissolution de la différence entre bien et mal), sémantiques (dilution du sens des mots, qui n’est plus que l’objet du caprice du pouvoir, comme dans la formule « La guerre c’est la paix, la liberté, c’est l’esclavage, l’ignorance, c’est la force » (1984, George Orwell))

(7) Les journalistes des médias grand public, et donc subventionnés, continuent à se faire croire que son livre, Le grand reset, est le produit d’un délire collectif, bien qu’il soit téléchargeable gratuitement et en vente dans les librairies généralistes. 

(8) Les recherches faites dans le cadre de cet article m’ont fait tomber sur l’expression “désinformation positive”, attribuée à Sibeth N’diaye, l’ancienne porte-parole de l’Élysée ; il semblerait que cette expression ait été créée par des mauvais plaisants. Cela dit, vu le niveau de falsification présent dans la “communication” officielle, la notion de désinformation positive ne présente plus rien de caricatural ni de particulièrement absurde puisque l’absurde est devenu la norme. 

(9) À propos de cette notion d’état adulte, remarquons d’une part que les programmes de l’OMS prétendent enseigner le consentement à des enfants ou des adolescents tout en retirant au parent tout exercice de ce consentement. Remarquons aussi qu’un précédent avait été créé lors du confinement, où en Belgique notamment, un client de magasin ne portant pas de masque pouvait se voir infliger une amende, tandis que le gérant ou le propriétaire du magasin était également susceptible de se voir infliger une amende pour la même infraction, suggérant qu’un adulte était responsable du comportement d’un autre adulte. Soyons logique : si la responsabilité n’existe plus, le pouvoir est en théorie responsable des crimes et délits de tous ceux qui le subissent. Mais ce serait oublier les paroles d’Humpty Dumpty dans Alice au pays des merveilles : « La question est de savoir qui est le maître, un point c’est tout. » 

TOXICOLOGIE DU LANGAGE : AGENDAS PONCTUELS ET PERPÉTUELS DE LA PROPAGANDE (1/2)

TOXICOLOGIE DU LANGAGE : AGENDAS PONCTUELS ET PERPÉTUELS DE LA PROPAGANDE (1/2)

« On parle beaucoup d’incommunicabilité ou de crise du langage. Cette crise du langage est la plupart du temps artificielle, volontaire. La propagande a bouleversé consciemment la signification des mots pour jeter le trouble dans les esprits. […] Lorsqu’on dit que le blanc est noir et que le noir est blanc, il est en effet bien difficile de s’y retrouver. » Eugène Ionesco (propos radiophoniques)

Le personnage principal du film Le troisième homme (The third man, Carol Reed, 1949) est un écrivain nommé Holly Martins (joué par l’excellent Joseph Cotten, aussi crédible en personnage dépassé par les événements dans ce film qu’en psychopathe séduisant dans L’ombre d’un doute d’Alfred Hitchcock). Au début du film, Holly Martins débarque à Vienne pour apprendre que l’ami qui l’y a invité vient d’être tué dans un accident de la circulation. Apprenant que Martins est écrivain, le président d’une sorte de club culturel (ne sachant pas qu’il a affaire à un auteur de romans de gare avec cow-boys et indiens), l’invite à participer à une conférence littéraire, qu’il décrit comme « une initiative de propagande culturelle, car on en a bien besoin » (dans cette Vienne partagée alors entre les Français, les Britanniques, les Russes et les Américains). 
Cet emploi innocent du mot propagande aurait de quoi surprendre les occidentaux du XXIe siècle, qui lui accordent une valeur essentiellement négative (c’est-à-dire, propre aux régimes désignés comme autoritaires par les médias libres, indépendants et pluralistes largement financés par leur pays et par l’Union européenne, elle-même financée par les pays membres (1)). 

FALSIFICATIONS
Le Dictionnaire historique de la langue française nous apprend que jusqu’au tournant des dix-huitième et dix-neuvième siècles, le mot propagande signifie propagation de la foi (chrétienne). Ce mot prendra un sens politique après la Révolution en février 1795, avec la première proclamation officielle de séparation entre l’Église constitutionnelle et l’État. Il ne faudrait d’ailleurs pas en déduire hâtivement que le phénomène religieux s’est affaibli puisqu’à partir de cette époque, c’est le culte de la République et, plus méconnu car maçonnique, celui de l’Être suprême qui nimbera le régime d’une aura mystique (paradoxale car jamais assumée, et peut-être calquée sur le dogme de l’infaillibilité papale) jusqu’à nos jours, où l’ancien ministre Vincent Peillon appelle la laïcité Une religion pour la République. Ce serait d’ailleurs une erreur de croire qu’il s’agit d’une religion sans dieu puisque dans le règne de la contrefaçon, tout est divinisable, même, dans les républiques “communistes” (en réalité bolchéviques) de l’ancienne URSS. La propagande servirait donc à renforcer une sorte de dogme qui ne dit pas son nom. 
Aujourd’hui, pour innocenter les démocraties occidentales de toute pratique propagandiste, il suffit de remplacer un mot par un autre : propagande par publicité ou relations publiques (l’opération sera d’autant plus efficace que les mots se ressembleront, dans ce cas précis, la prépondérance des p, et des r ; de la même manière, certains antonymes sont facile à intervertir, tels ponctuel et perpétuel) et de l’associer avec les pratiques de pays ennemis ou jugés dangereux.

ORIGINES DE LA PROPAGANDE MODERNE
Comme beaucoup de choses fausses, martelées et perpétuellement suggérées dans le règne du mensonge par omission, il n’est que trop facile de croire que la propagande serait une invention des régimes fascistes, étant donné qu’on associe inlassablement la notion de propagande à Joseph Goebbels, ministre de l’Éducation du peuple et de la Propagande du Reich de 1933 à 1945. On en déduit paresseusement que ce serait des régimes fascistes, particulièrement le régime national-socialiste du Troisième Reich, qu’aurait éclos la propagande… 
La vérité est qu’un des livres de chevet de Joseph Goebbels était Propaganda, manifeste d’Edward Bernays paru à New York en 1928. Wikipédia nous apprend que les techniques de propagande moderne ont été codifiées et appliquées la première fois d’une façon scientifique par Bernays et l’essayiste Walter Lippmann. Bernays était le neveu de Sigmund Freud (lequel avec l’invention controversée de la psychanalyse a contribué à réduire l’humain à ses pulsions sexuelles, idées exploitée avec grand profit par le cinéma et la propagande commerciale qu’on appelle aujourd’hui publicité) et se voyait, selon ses propres mots comme un « psychanalyste des corporations en difficultés » (comme l’écrit Norman Baillargeon dans sa préface à la réédition française du livre de Bernays). Il n’est d’ailleurs pas interdit d’étendre la notion de corporation à tout système étatique. Bernays est l’inventeur de ce qu’il appelle « Ingénierie du consentement ». 
En France, c’est en mars 1938 qu’apparaîtra un ministère de la Propagande, dans le second cabinet Léon Blum. Ce ministère continuera d’exister sous la Quatrième République sous le nom de ministère de l’Information. Notons que dans cette période de grande prospérité appelée Les trente glorieuses, largement suppléé par la société de consommation naissante, le contrôle des masses était temporairement moins crucial.

DÉSINFORMATION ET MANIPULATION DE L’OPINION
Si le terme propagande est associé uniquement à des formes de communication gouvernementale, c’est parce qu’il implique l’emploi de techniques de manipulations des masses dont seuls des États, et des « États dans l’État » (comme l’avait dit John Kennedy à propos de la CIA) ont les moyens, d’ailleurs financés par les contribuables, qui sont aussi les destinataires de ce lavage de cerveau. 
C’est donc en occident, plus précisément à Londres que sont nées les techniques d’ingénierie sociale modernes (prononcer “in-gé-ni-rie” et non “ingé-nieu-rie”) et de manipulation des masses, dans le Bureau britannique pour la propagande de guerre (Britain’s War Propaganda Bureau), créée en 1913 et siégeant à la Wellington House. Ses activités sont restées confidentielles jusqu’en 1935, et des écrivains aussi connus que Arthur Conan Doyle (auteur de la série Sherlock Holmes), Thomas Hardy (auteur du roman Tess d’Uberville), H. G. Wells (auteur de La guerre des mondes, La machine à remonter le temps…), G. K. Chesterton, John Galsworthy, etc. ont collaboré dans le secret avec cette officine, puisque le propre d’une propagande réussie est d’enrôler des agents officiels et officieux dans tous les domaines de la vie publique et artistique (voir au printemps 2020 la mise à contribution contre rémunération des youtubeurs et autres influenceurs, enrôlés pour nous encourager à « rester chez nous »)

INGÉNIERIE DU CONSENTEMENT
L’opération la plus retentissante des activités du Bureau britannique pour la propagande de guerre aura consisté, au début de la Première guerre mondiale, à propager des accusations d’atrocités commises par les Allemands contre les civils en Belgique : faisant croire notamment que des soldats allemands assoiffés de sang auraient coupé les mains à des enfants belges, violé et démembré des femmes qui auraient été clouées à des portes de bâtiments publics (2) ; on retrouve même des traces de ces rumeurs dans Le temps retrouvé de Marcel Proust ; de la même manière, et plus récemment, le journal Israélien Al Haaretz dévoile qu’il est impossible de retrouver la trace de prétendues victimes de viol par des agents du Hamas qui avaient pourtant été relayées par la presse mondiale. 
Les activités souterraines de la Wellington House ont donc largement contribué au retournement de l’opinion américaine et à l’entrée en guerre des États-Unis dans le premier conflit “mondial” (occidental en fait). Ce n’est pas un mince exploit puisque d’une part, le gouvernement américain avait dès le début du conflit pris le parti de la neutralité, que d’autre part la population américaine, dont une partie non négligeable était d’origine allemande, était opposée à l’entrée en guerre de son pays. 
C’est de manière stratégique que les opérations de désinformation et de confusion seraient menées depuis Londres et non depuis les États-Unis. En effet, les ambassadeurs britannique, français et belge s’étaient prononcés contre l’établissement d’un service de propagande sur le sol américain, afin de brouiller les pistes face à la trop manifeste propagande allemande (3). Pour faire court, cette propagande conçue à la Wellington House, financée par la couronne britannique et par les inévitables Rothschild, et importable d’un côté à l’autre de l’océan Atlantique, allait bénéficier du relais de l’édition, de la presse, de la publicité et des cinémas, qui diffusaient depuis 1910 des images de ce qu’on appelle à tort ou à raison « actualités » ou « informations » (Newsreels en anglais). 

MÉDIAS DE MASSE ET EFFET DOMINO
Le complot de retournement de l’opinion ourdi à la Wellington House allait donc contribuer à modifier l’opinion américaine, avec les conséquences que l’on sait. Si le propre des démocraties occidentales est d’avoir besoin de l’assentiment de leur peuple pour engager des opérations de grande envergure, elles ont aussi, les moyens de « manufacturer ce consentement collectif ». Précisons que s’il n’est que trop facile de se croire immunisé contre la propagande et la publicité, celles-ci agissent effectivement sur les masses ; et pour agir sur les masses, il faut bien qu’elle agissent directement ou indirectement sur les individus, quel que soit le sens dans lequel s’exerce cette influence, puisque, manipulée par des moyens en apparence honnête (les réseaux médiatiques et audio-visuels du monde défini par lui-même comme “libre”) avec des moyens agissant à l’échelle d’un pays, cette opinion est modelée, de sorte qu’elle peut à son tour influencer les idées et le comportement de la masse des paresseux, des indécis et surtout, catégorie redoutable : des indifférents. Plus près de nous, à partir du printemps 2020, on a pu prendre la mesure de la puissance de persuasion d’une presse maintenue en vie par les subventions gouvernementales et essentiellement contrôlée par les intérêts privés, puisque possédée par quelques oligarques (mot qui n’est employé par elle que pour désigner de riches hommes d’affaires russes). 
(À SUIVRE)

NOTES
(1) Un peu comme si un ami fondait avec votre contribution financière et votre adhésion, un club aux règles contraignantes et que vous soyez récompensé de votre participation à ce club en étant obligé d’obtempérer à toutes les restrictions imposées, y compris en dehors des assemblées, sous peine de sanctions financières et en récupérant au final, sous forme d’aides prodiguées par ce club, moins d’argent que vous n’en avez investi (ce qui est, certes, toujours mieux que rien). 
(2) Il ne s’agit pas de nier que des crimes de guerre aient été commis ; en revanche, le rôle des services de propagande naissants a consisté, avec l’expertise fournie par les résultats des recherches en psychologie, à mêler les fausses informations et le vrai, notamment en insistant sur des actes sexuels pervers, les mutilations sinistres, et les récits atroces de sévices commis sur des enfants d’une véracité souvent douteuse (selon, notamment, l’historienne Nicoletta Gullace dans son livre The Blood of Our Sons : Men, Women, and the Renegotiation of British Citizenship during the Great War, 2002) ; en termes de crimes de guerre avérés, la page Wikipédia mentionne essentiellement des déportations, du travail forcé et des destructions industrielles. (fr.wikipedia.org/wiki/Viol_de_la_Belgique)
(3) la “supériorité” redoutable de la publicité telle qu’elle existe depuis les années cinquante, réside dans son utilisation de la séduction et de toutes les formes du divertissement ; le cinéaste Jean-Jacques Beineix, mort il y a quelques années et qui venait de la publicité a déclaré qu’il y avait plus d’idées dans une minute de celle-ci que dans une heure et demie de cinéma ; c’était négliger le fait que la publicité est un médium fondamentalement vampirique.

Illustration : Gehrard Glück

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TOXICOLOGIE DU LANGAGE 5

DIVERSITÉ
Vu dans les entrepôts d’une société de grande distribution belge, des affiches représentant des mains de personnes de couleurs de peau diverses formant une couronne en agrippant chacune le poignet d’un autre. Le slogan : « La diversité, c’est notre force. »
Adressé à des ouvriers de nombreuses nationalités, y compris des Belges de souche, francophones ou néerlandophones, de facto amenés à travailler ensemble, le message a quelque chose d’insultant, voire d’humiliant. 
Notons que cette obsession oligarchique de la diversité accorde à ceux qui s’en réclament le pouvoir magique de taxer de racisme ceux à qui elle inspire de la méfiance. Cette “diversité” qui a pour prétexte la lutte contre le racisme présumé (c’est-à-dire soupçonné jusqu’à preuve du contraire) des blancs (pris comme un tout puisqu’on n’est jamais à une contradiction près) exclut toute diversité d’opinion hors des conditions fixées par le pouvoir républicain, démocratique, citoyen, etc.
Cela dit, pour revenir au slogan “La diversité c’est notre force”, il n’est pas inutile de se demander qui est le “nous” dans « notre force », étant donné que l’intérêt des ouvriers n’est pas la première préoccupation d’un employeur. À l’époque du mensonge inclusif il n’est pas interdit de penser (jusqu’à nouvel ordre), qu’il s’agit du même “nous” exclusif employé par M-K Monarc (certains comprendront l’allusion) dans le discours où il disait « Nous sommes en guerre ». Le pervers dit toujours la vérité puisque le raisonnement pervers décide de ce qu’est la vérité. En cela il est d’ailleurs irréfutable. 

ENSEMBLE
Adverbe toxique dès lors qu’il est prononcé par une langue fourchue, fût-elle présidentielle. 

ÉQUITÉ
L’égalité ne suffisait plus. Le mot équité contient un fort pouvoir de persuasion,  de confusion et de perversion. Comme toutes les notions absolues (liberté, égalité, droit…), il est sciemment employé par le pouvoir dans un sens différent de celui dans lequel il est perçu (le pervers retourne toujours la convention contre celui qui y reste attaché). L’Égalité fait partie de la devise de la franc-maçonnerie, qui est la même que celle de la République ; or l’égalité maçonnique est celle des “frères”, des initiés, statut auquel ne peuvent prétendre aujourd’hui que 260 000 personnes en France. Peu importe d’ailleurs, selon la propagande maçonnique vraie ou fausse, que ces cachottiers nous veuillent du bien qu’ils appellent, pour la galerie, « l’amélioration de l’humanité », que nous ne sommes pas – secret oblige – en mesure d’évaluer. Ce “bien” ne saurait donc nous être infligé que malgré nous. Pour revenir à l’équité, c’est donc en son nom qu’Emmanuel Macron a décidé que les petits candidats ne participeraient pas au débat “démocratique” du second tour des élections présidentielles. Une compréhension intuitive de cette notion aurait au contraire exigé un temps de présence médiatique inversement proportionnel à la notoriété, sorte de handicap pour les candidats déjà trop connus. 
Cette mesure est juste dans un monde régi par la fable de la représentativité, qui soumet aux nombres, aux pourcentages, la légitimité des pouvoirs ; à ceci près que même si elle était strictement suivie, cette pseudo-soumission aux nombres est fallacieuse dans son principe (la majorité n’est qu’un argument de force dans un jeu où le nombre serait le seul critère de victoire) et frauduleuse dans sa pratiqu, puisque les candidats élus par en-bas selon des protocoles pipés, sont sélectionnés par en-haut, selon un système de relations informelles et de cooptation où interviennent des réseaux occultes. 
En “démocratie”, le principal est que ces mesures soient prises au nom d’une notion qui ait de la gueule et qui fasse fermer la leur aux mécontents. 

EXTRÊME / EXTRÉMISME (version courte)
Pour ceux qui ne l’auraient pas remarqué, nous sommes passés d’une république qui nous bassinait avec la lutte contre les discriminations, contre les amalgames (au moment des attentats du Bataclan – signalons au passage que les attentats meurtriers sont très souvent des opérations des services secrets*) et le racisme, à une république qui a fait de la discrimination, de l’amalgame et du racisme ses mots d’ordre. 
– la discrimination : passe “sanitaire”, “passeport vert” dans sa version européiste 
– l’amalgame : toute critique étant assimilée au mouvement antivax ou à l’accusation infâme de “complotisme” et de sympathie avec l’extrême droite (voir l’article Hypnose)
– le racisme : anti-russe. 
Mais cette république (Fausse res publica, chose publique en réalité confisquée par des intérêts privés) prétend lutter contre tous les extrémismes… Le bluff continue à fonctionner, en raison d’un phénomène d’hypnose, mais aussi pour une autre raison très simple : on imagine le spectre politique comme une ligne. Il suffit de modifier la représentation par exemple en triangle (un œil au milieu sera très décoratif, comme sur le billet de un dollar) : gauche-centre-droite et alors c’est magique : on obtient non plus deux mais trois extrêmes. 

*www.youtube.com/watch?v=N8WOpLgdCug

FACT-CHECKER
Les “fact-checker” ou “vérificateurs de faits” (parce que pourquoi pas ?) travaillent pour les versions officielles édictées par la loi du plus fort, qui fait croire qu’il obéit à la volonté du plus grand nombre exprimée à l’échelle nationale, fameux “principe démocratique”, alors que sa raison d’être est de  cacher au plus grand nombre qu’il ne suit en réalité que la loi d’une oligarchie apatride). 
Les “vérificateurs de faits” (expression qui contient deux termes mensongers : vérifier dérivant de vrai, et fait désignant en réalité la légende officielle) ont bien du mérite quand il s’agit de rappeler à l’ordre ceux qui critiquent l’obligation de porter le masque, alors que les ministres et divers représentants, peuvent affirmer impunément en hiver que les masques « ne servent à rien en population générale », puis au printemps qu’ils sont indispensables. Ce mérite n’est qu’apparent dans la mesure où toute sentence qu’ils produisent obéit au principe : « C’est vrai puisque je le dis ». La plus grande partie de leur travail consiste à donner des apparence de finesse à cette opération de rouleau-compression du réel. La sagesse populaire résume leur art par l’expression « couper les cheveux en quatre » ; des tronçons résultants, les “vérificateurs” sodomisent des mouches non consentantes. 

FANATISME (version courte)
Fanatique = serviteur de temple (fanum = temple) ou “inspiré” ; ce mot est de la famille de profane : devant le temple, donc, hors du temple. 
Le pouvoir et les médias nous mettent depuis des décennies en garde contre le fanatisme et l’intégrisme, de préférence islamistes, imprimant dans nos consciences des images de visages déformés par la haine, des paroles viciées par les appels à la violence et au meurtre. Or l’histoire officieuse nous apprend que les opérations terroristes sont presque toujours orchestrées par les services secrets (voir les analyses de Jacques Cheminade et de Youssef Hindi) en particulier anglo-saxons et israéliens. Et que si les fous d’Allah existent bien, il ne faut pas oublier les fous de Sion (et aussi « les fous d’eux-mêmes », comme le dit Lotfi Hadjiat dans Les ennemis de l’humanité, désignant ainsi les identitaires et les suprémacistes de tout poil). 
Pour revenir au fanatisme, force est de constater que le pouvoir s’est converti au printemps 2020 en une meute organisée résolue à régenter notre organisme au moyen du fanatisme “vaccinal” – au prix de la falsification des mots vaccin et immunité collective, et en ayant pris la précaution de nommer vaccin un produit inconnu et expérimental. Le culte se diversifie puisqu’il s’agit à présent de régenter nos consciences au moyen du fanatisme anti-russe, notre mode de vie au nom du fanatisme “écologique” et notre perception de l’humanité au moyen du fanatisme LGBTaire. Ces fanatismes ne disent pas leur nom puisqu’ils émanent du pouvoir nominaliste et modéré, qui décide du sens des mots (par exemple modéré). Comme dans cet échange dans De l’autre côté du miroir : (Alice) – La question est de savoir si vous avez le pouvoir de faire en sorte que les mots signifient autre chose que ce qu’ils veulent dire. – La question, riposta Humpty-Dumpty est de savoir qui est le maître… un point c’est tout. 
L’artifice suprême consiste à faire croire que l’opinion du plus grand nombre est forcément raisonnable et modérée, tout comme l’adhésion à cette opinion, ce que pulvérise en une formule un article trouvé sur internet : « Le conformisme est un fanatisme ». 

FÉMINICIDE
Contrairement à “homicide”, qui est véritablement inclusif, ce mot exclut soit les femmes, soit les autres, de l’humanité ordinaire. 

GAUCHISME
À ne pas confondre avec « convictions politiques de gauche », proto-révolutionnaire dont il est la version intolérante, arrogante, psycho-rigide, tyrannique et potentiellement génocidaire. Il n’existe pas de mot plus simple pour qualifier son état d’esprit que “pharisaïsme”, qui est la tendance du sujet à croire « J’ai raison, puisque je parle depuis le camp du Bien ». Le gauchisme (dans lequel je n’englobe pas toute la pensée de gauche : Étienne Chouard, Jean-Claude Michéa, entre autres) découle des mentalités révolutionnaires et du crédo fanatique « Pas de liberté pour les ennemis de la liberté », slogan efficace : personne ne voulant a priori se ranger du côté des ennemis de la liberté. Inutile de se croire à l’abri ; ce n’est pas de vous qu’il dépendra de rester un ami de le liberté puisque vous serez soumis à la sentence d’un juge partial : républicain – et donc infaillible. Lors des procès staliniens, les protestations d’innocence étaient considérés comme des preuves supplémentaires de culpabilité. En y réfléchissant, cela devient dangereusement facile à croire. Dans les régimes démocratique et républicains où la liberté n’est pas un vain mot (c’est-à-dire : où le mot sert à faire croire à l’existence de la chose et uniquement à cela), les gauchistes sont profondément conformistes. D’ailleurs les figures de proue du monde intellectuel : Michel Onfray, Alain Badiou, Slavoj Zizek et Noam Chomsky ont sombré corps et rien  dans le covidisme. 

Illustration : Le Douanier Rousseau Paysage exotique avec des singes jouant (1910) (détail)

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